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Regards sur Marseille - Pythéas - 09-08-2004

Pour Chauvet


[Image: marseille-b-06.jpg]




Mon Marseille,

Vous voyez cette toute petite traviole, où le soleil n'arrive pas jusqu'en bas ?, c'est le baron Haussman qui l'a dessinée, comme ils devaient être fiers les Marseillais pour qu'un aussi prestigieux architecte se penche sur ce vieux quartier St Martin, en 1863.
Un siècle plus tard exactement c'était le chemin de mon école. Nous venions en courrant de la rue de la république, lumineuse et bruyante, pour nous engouffrer dans une alcôve obscure gardée par un marchand de loterie des gueules cassées, que nous appelions généreusement Papa Noël...plus impressionnés par sa longue barbe grise de vieux légionnaire, que pour sa véritable aptitude a apprécier les sales moutards que nous fûmes !.Là un monde de clair obscur mêlé d'odeurs multiples nous transmutait sans escale dans une autre dimension, nous ralentissions le pas pour que nos yeux aient le temps de distinguer les moulures somptueuses des plafonds et les allégories pourvoyeuses de nos cauchemars d'enfants, que seul le bruit régulier de la machine du torréfacteur de café et du parfum capiteux qu'il en émanait, nous faisaient faire fi de cet enfer de pierres et de staff.

Passage de Lorette 1963.


Regards sur Marseille - boeuf mode - 10-08-2004

Tres jolie ouverture de topic ! Cheers


Regards sur Marseille - Ladykillers - 10-08-2004

:thumbup:
La belle idée de topic, effectivement !
Dès que j'aurai un peu de temps, je pondrai quelques Regards, promis.

Pour l'anedocte, il me semble que la Rue de la République toute entière est signée du Baron Haussman. Me trompette-je ? Elle mériterait un meilleur sort, d'ailleurs, cette artère. Peut-être qu'Euro-Méditerranée va passer par là ?


Regards sur Marseille - Pythéas - 10-08-2004

LadyKillers a écrit ::thumbup:
Pour l'anedocte, il me semble que la Rue de la République toute entière est signée du Baron Haussman. Me trompette-je ? Elle mériterait un meilleur sort, d'ailleurs, cette artère. Peut-être qu'Euro-Méditerranée va passer par là ?
A vrai dire, on n'en sait trop rien si elle est signée du Baron Haussman himself... Mais elle fut percée en 1864 dans le "goût hausmanien", ce qui a eu pour effet de détruire le très ancien quartier populaire de Saint-Martin ( au moyen-âge, quartier de la juiverie ). Les édiles de l'époque voulaient nettoyer ce "nid de révolutionnaires" ( en fait de braves gens sans trop d'histoires, pas tout a fait du "Panier" pas vraiment "des Carmes" qui subsistaient vaille que vaille... mais qui subsistaient ).

Il y a 142 ans, s'ouvrait à Marseille l'un des plus vastes et des plus spectaculaires chantier que la ville ait jamais connu. Le percement de la rue Impériale, aujourd'hui appelée rue de la République, qui débute en août 1862 et qui s'achève officiellement deux ans plus tard, le 15 août 1864. Je me souviens encore de la célébration de son centenaire, les calèches et voitures à chevaux remontant en plein cagnard jusqu'à la place Sadi-Carnot avec à leur bord un Napoléon III aux moustaches décolées par la sueur et une toute jeune fille sensée représenter la fée des Marseillais: Eugenia de Montijo véritable bienfaitrice de notre ville ( d'ailleurs Castellane, avenue du Prado, le Pharo... sont des lieux qu'il faudrait prononcer avec l'accent espagnol tant la présence de cette illustre dame est et demeurera liée à ces endroits ainsi qu'à l'urbanisation moderne de notre ville)...Le pouvoir Impérial, comme tout pouvoir centraliste qui lui a succédé, avait bien plus tendance à presser le citron...que de beurrer la tartine. On voulait s'offrir une conquête coloniale à moindre frais!...Marseille aurait été une porte de carton pâte sur l'orient, sans cette impératrice très pieuse, qui était véritablement tombée en admiration devant le nombre incalculable de paroisses de la ville et la grande dévotion que le peuple Marseillais offrait à Mrs de Belsunce, héros de la grande peste de 1720...Sans le savoir, ils s'étaient attachés une personne de très grande influence comme ambassadrice.
[Image: 2-015eug.jpg]

Mais en réalité il faudra encore trois années supplémentaires pour que l'artère prenne son aspect définitif. La raison est simple : l'entreprise est immense. Il s'agit de percer une rue entre le Vieux-Port et la Joliette et de construire des immeubles d'habitations
Pour cela, il faut tailler dans les collines une tranchée 250 m, détruire une soixantaine de rues, démolir 935 maisons, indemniser en quelques mois propriétaires et locataires, et bien sûr reloger quelques 16000 personnes évacuées. Pendant 20 mois, ce sont 2500 ouvriers qui ½uvrent avec une rapidité déroutante pour percer la nouvelle avenue.

[Image: republique-rue.gif]

Gambetta ira même jusqu'à comparer Marseille à New York !
Si l'ampleur des travaux est telle, c'est que la période s'y prête, je l'ai dit, les années 1860 sont celles du Second Empire dites de l'Empire libéral avec une prospérité économique pendante aux mauvais résultats de la politique extérieure de la France (notamment avec la Prusse), ce qui oblige l'Empereur à faire des concessions hâtives avec les grands financiers. Mais c'est tout de même une période d'essor économique, de progrès technique et de foi dans l'avenir, La fièvre de construction s'empare alors de la France à Paris, on assiste à la transformation de la ville par le préfet Haussmann et cette urbanisation si caractéristique n'est pas sans rapport avec la toute récente obtention du droit de grève. A Marseille, la population augmente, elle est de 195 350 Hbts en 1851 de 360 100 en 1881 pour arriver à 550.619 en 1911. L'immigration est importante, et donne lieu quelquefois a des débordements assez dramatiques, et puis surtout, la ville se développe économiquement, les colonies, à l'instar de l'Algérie, connaissent un essor fulgurant, le commerce maritime explose. Marseille détient à ce moment là, à elle seule, plus de la moitié de la flotte de commerce française.

Les nouveaux bassins sont construits à la Joliette, ce qui rend le Nord de la cité attractif. Il s'agissait par la même occasion de relier l'ancien et le nouveau port et créer un second centre d'activité vers le Nord.

Cependant, la nouvelle artère n'est pas très appréciée par les Marseillais et fait couler beaucoup d'encre. Ce qui choque avant tout, ce sont les destructions massives : souvenirs et témoignages du passé disparaissent au rythme des tirs de mines.

Les Marseillais n'apprécient pas non plus l'architecture parisienne, une anecdote, jusqu'à la fin du XIXe siècle, les habitants y avaient une curieuse chambre d'été ; le soir, ils montaient leurs couches sur le toit, dûment équipé d'une rambarde longitudinale, et dormaient ainsi à la belle étoile... Mais cela ne suffisait pas a atténuer le contraste avec le vieux Marseille dont les constructions étriquées font le charme de la ville. Enfin les loyers sont trop chers pour la majorité de la population. ( j'ai dans mes archives familiales un bail de loyer datant de 1887 pour un logement situé rue Audimar (aujourd'hui rue Jean Trinquet) pour 2 pièces donnant sur rue, par 3 fenêtres et 2 balcons, d'une cuisine équipée luxe suprême ! d'une pile et de 4 étagères sur cadre...le cabinet s'appèle "bouge" et est à l'étage! le tout pour 120 Frs/ mois ( plus ou moins 300¤ 2004, le même loyer en 1945 est de 6160Fr). Sauf qu'un docker qui obligatoirement était journalier gagnait 2.60 Fr/jour. Les immeubles sont en réalité destinés à la bourgeoisie d'affaire, ce qui accentue vous l'imaginez les divisions sociales.
Mais, si l'initiative fut un terrible échec financier, et n'entraîna pas le développement d'un centre au Nord de la ville, la rue Impériale ne fut pas pour autant une erreur. Marquant la naissance de la ville contemporaine, elle représente aujourd'hui une des plus belles avenues de Marseille, et reste le témoignage d'une époque qui compte parmi les plus glorieuses pour la cité phocéenne.


Regards sur Marseille - boeuf mode - 10-08-2004

J'aime lire ce genre de témoin...Cheers Là où les murs de la ville résonnent en bleu et blanc...


Regards sur Marseille - Ladykillers - 10-08-2004

Pythéas a écrit :Les immeubles sont en réalité destinés à la bourgeoisie d'affaire, ce qui accentue vous l'imaginez les divisions sociales.

Mais, si l'initiative fut un terrible échec financier, et n'entraîna pas le développement d'un centre au Nord de la ville, la rue Impériale ne fut pas pour autant une erreur. Marquant la naissance de la ville contemporaine, elle représente aujourd'hui une des plus belles avenues de Marseille, et reste le témoignage d'une époque qui compte parmi les plus glorieuses pour la cité phocéenne.

:mf_napole pour l'historique, et moi qui venais avec une toute petite question, gentillette Clap Je me retrouve en face d'une Encyclopédie, c'est très agréable.

Maintenant, ce que je cite, j'ai l'impression d'entendre les mêmes remarques, un siècle plus tard, à propos d'Euro-Méditerannée et du Panier.

Est-ce seulement une impression ?

Raspigaous dans leur dernier album a écrit :Habitants du Panier et de Marseille tout entier,
Il faut se mobiliser, se réunir et s'expliquer.
Organisons une défense, soyons plus malins qu'ils ne le pensent.
Gaudin devient méchant, Gaudin devient menaçant ;
Il faudrait lui faire comprendre que notre quartier n'est pas à prendre
Lui faire ravaler son projet Euroméditérannée.
Si personne ne lui dit, il va nous transformer Marseille en Paris.
Et nous aussi, attention Marseillais réagis !

Bon, ils ne sont pas du tout engagés, ni marqués politiquement, mais en tout cas, ils aiment leur quartier.


Regards sur Marseille - pixie - 11-08-2004

Jawdrop La classe ce post merci à toi Pythéas Worthy


Regards sur Marseille - Pythéas - 11-08-2004

Le projet Méditerranée, il a bientôt 10 ans! Faudrait pas qu'il traîne encore 10 ans, parce que vu l'état de délabrement que tout le centre ville a subit décennies après décennies sans le moindre investissement.... Marseille s'écroulera de vétusté ! Alors au-delà des grandes intentions qui consistent à "prendre le problème à bras le corps en intégrant les questions de culture et de formation-recherche et en prenant en charge l'évolution des tissus sociaux et urbains"...et gna gna gna ; Il faut simplement prendre la truelle et s'y mettre. Les bâtiments de la rue de le république sont délabrés au plus haut point, La porte d'Aix, Les Carmes, Belsunce, Le Panier, La Joliette, Arenc, Les silos... C'est 300/350 hectares a revoir en profondeur et en démolir au moins 20!!...Perso j'aurai dynamité les paquets de lessive de la bourse, Marseille est la seule ville de France où l'on a fait des barres à la verticale...Tonton s'était fait avoir, sachez qu'il était prévu d'en faire le double, les ruines Grecques de la Bourse, nous ont sauvées du désastre.
Nous sommes d'accord , un projet de cette envergure se conduit pas à pas... Ce qui d'un autre coté offre l'avantage de dresser des bilans intermédiaires, certaines opérations sont déjà livrées ou en passe de l'être : Les Docks 70 000 m2 + 35000 m2 livrés en 2002 et 2003 sont-ils occupés par des entreprises ? Sont-ils rentabilisé ? Combien d?emplois crées ? A part Louis Dreyfus Communication où sont les employeurs privés ? Parce que, le tunnel de Lajout est ferroviaire (donc déficitaire avant même de commencer a l'exploiter), la Maison de l'Habitat, le Pôle du Patrimoine, le gymnase et l'espace public St Jean...ont coûtés un gros paquet, il faut qu'ils rapportent !
Par contre ce qui peut, non ! ce qui DOIT sacrifier à la rentabilité c'est le logement, la ZAC de la Joliette pour 70 000 m2 et 17 000 m2 de commerces et 60 000 m2 d'équipements publics, qui ont coûté 90M¤ et bouffé 22 hectares, la ZAC St Charles-Porte d'Aix de même avec 42 000 m2 de bureaux et 50 000 m2 de logements... sur 16 hectares et un budget de 50 M¤, les archives départementales et la bibliothèque de prêt qui doivent être opérationnelles depuis 2003.Bref ! c'est du Kolosal...Tout autant que le rasage gratis de l'ancien quartier du Vieux-Port par les Allemands...parce qu'on en a mangé des couleuvres à Marseille et sans même avoir le droit de poser la moindre question!!!.

Enfin, les opérations comme la revitalisation de la rue de la République (réhabilitation de 4000 logements, création d'un tram, d'un parking) s'étale dans le temps tout comme la réhabilitation des friches industrielles de la Belle-de-Mai (120 000 m2 en 3 pôles : patrimoine, industries culturelles et de la communication et spectacles vivant) ont démarré, en 99 pour s'achever en 2005.

Mais ce que l'on ne pourra jamais empêcher, c'est la spécu. L'immobilier à Marseille a explosé, de quoi faire tourner des têtes, de quoi vendre son âme à Gémenos, Aubagne ou Peypin. C'est la même chose chez moi à Banyuls, 300% en 10 ans Reste à savoir si l'on veut le beurre, l'argent du beurre...et la crémière, par la même occasion.
Les gens du Panier devront choisir, comme les autres. Témoignage ? :
Le Panier est le plus vieux quartier de Marseille et le centre historique de la ville, à deux pas du Vieux Port. C'est un quartier populaire et cosmopolite qui a toujours été habité par des immigrés. Aujourd'hui, beaucoup de Maghrébins et de Comoriens y vivent. Il y a une ambiance village avec des ruelles, de petites places, des maisons de toutes les couleurs, du linge qui pend d'une fenêtre à l'autre, des gens qui se parlent dans la rue, des enfants qui jouent au foot.
On n'a pas l?impression d'être au centre d?une grande ville. Mais derrière la façade, il y a beaucoup de problèmes. C'est un quartier pauvre, en mauvais état où les conditions de vie sont difficiles.
Au Panier, il y a un centre social très actif qui organise beaucoup de choses pour les jeunes du quartier. Un groupe de jeunes a créé une association, " 02QP ", pour développer la culture hip- hop. Il y a Kays, Aïcha, Kader, Atou et Momo qui viennent tous de l'autre côté de la Méditerranée. Ils trouvent que le Panier a beaucoup changé : " il n'y a plus l'ambiance village, ce n'est plus comme avant. La ville construit des parkings et des immeubles au Panier mais ils ne font rien pour les jeunes, il n'y a pas de terrain de jeu, il n'y a pas de stade, il n'y a pas de jardin et les enfants n'ont pas d?endroit pour jouer ". Atou et Momo font du rap, c'est un moyen pour eux de s'exprimer. Aïcha, elle, a choisi les études, pour elle c'est un moyen de s'intégrer. Elle espère trouver du travail à la mairie. Ils ne s'intéressent pas à la politique : " parce que les hommes politiques ne s?intéressent pas à nous ".
?C'est exactement comme ça que mes ancêtres parlaient, il y a 50, 60 ans, et plus
[img] http://photos.pagesjaunes.fr/1/c/tbf/user=pjphoto;uri=eaXxyuHMF4KGAMBjjQ4xYuKT9DNrSisF4zspbwU24h3AeDmIzU9LPI0n719PynyofLMGqrhXMoo=[/img]
Entrée (murée) de l'Ecole (autrefois des garçons) Par la rue des Phocéens
Pythéas allait à l'école, rue des Phocéens, que voulez-vous que cela donne ?


Regards sur Marseille - Dany - 11-08-2004

Moi, j'ai bien aimé que tu rappelles tout ce que doit Marseille à l'Impératrice Eugénie et par là même à Napoléon III. King
(au passage, très belle biographie de Mizla sur Napoléon III)
Haussman on aime ou pas, perso, je suis plutôt pro alors quand je suis arrivé à Marseille, la rue de la République m'a tout de suite plût.
Je crois qu'elle est en pleine restauration et ce que tu écris le confirme.
Depuis quelques années, ça bouge dans le coeur de la ville. C'est donc que ça vit. Les améliorations (rafraichissements des façades, aménagements urbains divers...)en témoignent.
Maintenant que ceux qui y vivent ou qui y ont vécut ne soient pas d'accord, je peux le comprendre mais il faut aller de l'avant, Marseille en a besoin.


Regards sur Marseille - deepbluebdr - 12-08-2004

boeuf mode a écrit :Simplement du respect !Bowdown
L'amour de Pythéas pour sa ville Wub il nous le fait si bien partager, un régal.
Applause


Regards sur Marseille - Pythéas - 13-08-2004

Dany a écrit :Moi, j'ai bien aimé que tu rappelles tout ce que doit Marseille à l'Impératrice Eugénie et par là même à Napoléon III. King
(au passage, très belle biographie de Mizla sur Napoléon III)
Haussman on aime ou pas, perso, je suis plutôt pro alors quand je suis arrivé à Marseille, la rue de la République m'a tout de suite plût.
Je crois qu'elle est en pleine restauration et ce que tu écris le confirme.
Depuis quelques années, ça bouge dans le coeur de la ville. C'est donc que ça vit. Les améliorations (rafraichissements des façades, aménagements urbains divers...)en témoignent.
Maintenant que ceux qui y vivent ou qui y ont vécut ne soient pas d'accord, je peux le comprendre mais il faut aller de l'avant, Marseille en a besoin.
Merci Dany

Absolument, Marseille doit se rénover...Moi, j'y suis né dans les immeubles Haussman, j'ai du voir un ravalement de façades en 65,66...peut-être, quant à l'intérieur, rien, a part les "bouges" qui sont devenus des WC individuels, et les appartements qui étaient co-loués en 2 X F2 (coté rue, coté cour) jusqu'à la fin de la crise du logement (1945-1958) pour devenir des F4/5 par la suite, je suis à peu prés certain que l'agencement des immeubles de la rue de la république n'a pas changé, depuis leur construction, les matériaux doivent être dans un état épouvantable...Il suffit d'aller voir dans les photos des villes sur les pages jaunes, pour voir que pour une seconde ville de France (et même pour une troisième) Marseille peut mieux faire, nettement mieux faire !

La grande époque de Marseille commence avec Napoléon III, se poursuit tout au long de la III éme république...Et s'achève avec la perte de la colonie majeure qu'était l'Algérie. Je suis preneur de toutes références et de tout écris concernant cette ère de très grande prospérité.


Regards sur Marseille - Pythéas - 13-08-2004

deepbluebdr a écrit :L'amour de Pythéas pour sa ville Wub il nous le fait si bien partager, un régal.
Applause
Toi aussi tu nous en a fait "vivre"...avec de belles lignes.
S'il te reste quelques archives, surtout ne te gênes pas Ok


Regards sur Marseille - beepees - 13-08-2004

Très émouvant ce topic! Merci Pythéas... :y:


Regards sur Marseille - Mouchico - 13-08-2004

un grand merci à toi Pytheas :mf_farmer


Regards sur Marseille - Pythéas - 16-08-2004

Borsalino...et petites frappes, la justice au temps où Marseille se comparaissait à Chicago. Compte rendu des faits...d'une affaire quasi banale



Le nommé Guiffaut Jean-Baptiste, dit " la Griffe ", âgé de vingt-huit ans, se disant navigateur, domicilié 2 rue Audimar à Marseille, né le 12 juin 1902 à Ajaccio, interdit de séjour, déjà condamné naguère à cinq ans de prison pour avoir commis à Ajaccio, le 30 août 1923, un attentat sur le receveur municipal de cette ville.
Le receveur venait de retirer de la Trésorerie générale une somme de cent quarante mille francs destinée au paiement des employés municipaux. Au moment où il sortait de la Trésorerie, Guiffaut le renversa et s'enfuit avec l'argent vers le bois d'Olivetto. Il avait déposé cet argent entre les mains du patron d'un bar, mais, en apprenant l'attentat, ce dernier avait avisé la police qui rendit la somme au receveur municipal.
Guiffaut, qui fut condamné par la cour d'Assises des Bouches-du-Rhône le 15 décembre 1929, pour avoir attaqué en plein jour, en compagnie de quatre complices, trois garçons de banque dont l'un fut tué d'un coup de revolver en pleine poitrine.
Mobile de l'attaque : le vol.
Le mercredi 21 novembre 1928, le Crédit foncier d'Algérie et de Tunisie, dont les bureaux sont situés rue de la Cannebière, chargeait comme de coutume, vers 5 heures de l'après- midi, trois de ses employés de se rendre au bureau principal de la poste, derrière la Bourse, au coin de la rue Colbert, afin d'y déposer le courrier comportant de nombreux plis chargés contenant, pour cette journée du 21 novembre, une somme globale de trois cent quatre-vingt-cinq mille francs destinée à une société de construction navale de La Seyne-sur-Mer (Var).
Les trois employés désignés étaient : Messieurs Confortini Toussaint, âgé de cinquante- quatre ans, Roques Auguste, âgé de soixante-six ans, et Loudier Charles, âgé de soixante-six ans.
Quatre des enveloppes chargées avaient été confiées à Monsieur Confortini et les trois autres à Monsieur Roques.
Monsieur Loudier, qui exerçait à la banque les fonctions d'économe, avait pour mission d'assurer la sécurité du transport des chargements et, à cet effet, il était porteur d'un revolver.
Les trois hommes étaient arrivés derrière la Bourse, prêts à quitter le trottoir pour traverser le terrain conduisant à la poste, lorsque soudain, derrière une palissade, deux individus se précipitèrent sur Monsieur Roques qui, seul, était revêtu de la tenue de garçon de recettes de la banque. Au même instant, un troisième individu se jetait sur Monsieur Confortini et, le prenant à la gorge, l'immobilisa dans ses mouvements de défense. L'un des malfaiteurs, Guiffaut, celui qui avait attaqué Monsieur Roques, avait braqué son revolver sur la poitrine du garçon de recettes en lui disant :
- Lâche ça, ou tu es mort !
Monsieur Roques ayant lâché les plis, ce fut au tour de Confortini d'être menacé de mort. Les quatre plis de Confortini furent également arrachés. C'est alors que Monsieur Loudier mit en joue l'agresseur Guiffaut... Mais, hélas ! le bandit fut plus prompt que lui. Il lui tira un coup de feu dans la région du c½ur et le tua net.
Les trois bandits montèrent aussitôt dans une automobile qui était arrêtée, moteur en marche, en bordure du trottoir, et retrouvèrent un autre complice qui, avec le chauffeur, faisait le guet pendant l'attaque. La voiture démarra aussitôt à une vitesse folle et prit la direction d'Aix. L'automobile, qui avait été volée, fut retrouvée abandonnée dans un chemin de traverse à Septème-les-Vallons, à une douzaine de kilomètres de Marseille ; le numéro matricule avait été maquillé et on retrouva, dans la voiture, un fragment de billet de cent francs. L'automobile avait été dérobée huit jours auparavant à ses propriétaires, Messieurs Hebinge et Jullier, négociants, boulevard de la Liberté à Marseille, dans la soirée du 13 novembre 1928, vers 8 heures, alors qu'elle stationnait dans une rue. À noter que quelques heures avant l'attentat, les bandits en auto, rue Saint-Sence,(Ndr Rue Saint Sens) avaient attaqué une jeune caissière, Mademoiselle Chatail, et lui avaient dérobé quinze mille francs. Quatre jours auparavant, le 17 novembre, ils avaient dévalisé de sa paye Mademoiselle Fernande Chépan, employée de l'usine Saint-Rémy.
Le lendemain de l'agression des garçons de banque, les bandits se partagèrent le butin en six parts :
1° Chiocca Toussaint, vingt-sept ans, né à Ajaccio en 1901, déjà condamné, habitant 18 rue Neuve à Marseille (l'un des agresseurs), préleva trente-six billets de mille francs et douze mille francs qui devaient être envoyés pour venir en aide à deux camarades, Muraciotti et Chalot, tous deux en prison, le premier pour vol, le second pour meurtre.
2° Leonetti, vingt-huit ans, né à Propriano (Corse) le 3 mai 1900, habitant rue Boutterie à Marseille (complice faisant le guet dans l'automobile), reçut quarante-trois mille six cent soixante- dix francs.
3° Calendini, quarante-deux ans, titulaire de nombreuses condamnations, domicilié 60 quai du Port à Marseille, reçut trente-neuf mille francs.
4° Thomas Marius, qui avait donné les renseignements pour préparer l'attaque, reçut vingt-neuf mille sept cent cinquante francs.
5° Ceccaldi, ancien employé de la banque, indicateur du coup, tenant un bar à Endoume, reçut quarante-cinq mille francs.
6° Sénac, hôtelier, pour avoir caché l'auto avant l'attentat, reçut également une part.
7° Eyssantier et sa femme, tenant un bar, furent les principaux receleurs : c'est dans leur appartement que se fit le partage du butin et c'est lui qui fut le dépositaire de l'argent volé. Il dissimula cent vingt-cinq mille francs dans les couvertures de son lit.
Les trois principaux coupables ayant participé à l'agression :
1° Calendini André, quarante-deux ans, né le 30 mars 1886, fut condamné à vingt ans de travaux forcés.(Ndr Cayenne)
2° Mariotti, vingt-neuf ans, né à Ajaccio le 1er novembre 1899, vingt ans de travaux forcés.(Ndr Idem)
3° Chiocca Toussaint, vingt-six ans, né en 1902 à Ajaccio, déjà condamné, vingt ans de travaux forcés.(idem)
4° Leonetti, vingt-huit ans, né à Propriano (Corse), le 3 mai 1900, receleur, douze ans de travaux forcés.(idem)
5° Ceccaldi, l'ancien employé de banque, indicateur du coup, cinq ans de réclusion.
6° Thomas, ayant fourni les indications, huit ans de réclusion.
7° Santoni et Ricci, vingt-neuf ans, ayant reçu comme receleurs une somme de cinquante mille francs chacun, cinq ans de prison et dix ans d'interdiction de séjour chacun.
À noter le verdict inexplicable et illogique acquittant les principaux receleurs, ce qui démontre que manifestement, dans cette affaire, les influences politiques se sont exercées avec une ténacité arrogante : Eyssantier, frère d'un conseiller d'arrondissement de Marseille et ami d'un député communiste, principal receleur, avait été le dépositaire d'une somme s'élevant à plus de cent vingt mille francs! Son bar servait à l'occasion de salle de réunion au moment des élections. C'est dans son appartement que se fit le partage du butin. En outre, son bar était fréquenté par des individus plus ou moins louches, la plupart repris de justice. Il fut acquitté, ainsi que sa femme, complice du recel.
Un nommé Sénac, propriétaire d'une villa qu'il avait louée aux bandits après leur coup, fut acquitté.
À noter encore que le chauffeur de l'automobile et le chef de la bande ont pris la fuite en passant la frontière, et qu'ils sont restés introuvables.
Pour comble d'incohérence, sept des jurés qui condamnèrent à mort Guiffaut, signèrent ensuite un recours en grâce.
Guiffaut, au moment de quitter le greffe, s'adressant à un aide lui dit :
C'est vous, Monsieur Deibler ? Je vous demande une faveur, c'est de me laisser le temps de voir la guillotine.
En franchissant la porte de la prison, devant " la veuve ", il cria d'une voix forte :
Adieu, Fifine. Mort aux vaches !
Dans ce procès, l'acquittement des principaux receleurs, seuls solvables, ne laissa aux deux jeunes filles de Monsieur Loudier que leurs yeux pour pleurer... l'avocat de la partie civile obtenant pour les deux orphelines cent mille francs de dommages-intérêts qui ne leur seront jamais payés.

[Image: veuve.JPG]


Regards sur Marseille - Pythéas - 29-08-2004

Marseille...Ville sans nom(s) ?....Hum pas si sur




Un des faits marquants de l’ère industrielle est sans aucun doute la naissance dans les dernières décennies du XIXe siècle de la construction automobile. Cela constitue un des plus importants succès industriels de notre époque. L’aventure commence dans les années 1880, lorsque l’invention du moteur à essence permet de réaliser des véhicules plus pratiques et bien plus performants que " les voitures sans chevaux " dérivées des fameux fardiers à vapeur de Joseph Cugnot. En 1886, l’allemand Carl Benz construit un premier prototype propulsé par un moteur à quatre temps, suivi de très près par l’ingénieur Gottlieb Daimler. L’innovation gagne ensuite la France où la société Panhard-Levassor, fondée en 1886, achète la licence de Daimler et réalise à son tour un véhicule à essence (1891). Au même moment, Armand Peugeot lance une de ses voitures, également équipée d’un moteur Daimler, sur le trajet aller-retour Valentigney-Paris- Brest, long de 2.500 km, qu’elle réalise à une allure moyenne de 15 km/h. Certes, l’automobile reste encore une sorte de jouet technologique. Mais, en l’espace d’une décennie à la faveur d’une série d’avancées techniques, elle va s’affirmer comme un moyen de transport à part entière. La phase industrielle s’amorce alors au début du XXe siècle et, très vite, la France devient un des principaux pôles de production. A la veille de la Première Guerre mondiale, on y dénombre pas moins de 155 constructeurs pour une production de 45.000 véhicules de tourisme. Dès le début, Marseille participe activement au développement de cette nouvelle branche. Plusieurs entreprises y voient le jour ; mais une d’entre-elles allait connaître un destin à la hauteur de l’épopée automobile : la société Turcat- Méry.

Leon Turcat est diplômé de l'Ecole supérieure de commerce de Marseille et travaille avec son père, négociant en café et poivre.


[Image: doc-594.jpg]



Simon Méry, lui, diplômé de l'Ecole d'ingénieurs de Marseille, hésite encore sur l'orientation à donner à sa future carrière. Les réunions familiales leur permettent de se rencontrer et d'admirer les voitures que s'offre Alphonse, l'un des frères de Simon. Tout d'abord une Panhard-Levassor en 1895, la première voiture à circuler dans la cité phocéenne, suivie un peu plus tard d'une Peugeot. Enthousiasmés par ces drôles de machines, Léon Turcat et Simon Méry les examinent, remarquent leurs « défauts », et décident alors de construire leur propre voiture pour laquelle ils envisagent déjà quelques modifications personnelles !

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Malgré l'absence de local adapté, des moyens limités qui les contraignent à faire appel à quelques sous-traitants, les deux constructeurs en herbe, tout juste âgés l'un et l'autre de 22 ans, réalisent tout de même une première voiture à quatre cylindres horizontaux dont les qualités dépassent toutes leurs espérances. Un succès qui les incite à louer un petit hangar afin de persévérer dans cette voie. Une nouvelle voiture est mise en chantier, toujours une auto animée par un quatre cylindres, mais cette fois disposés verticalement, et avec une boîte de vitesses à... sept rapports, cinq AV et deux AR. Les essais de ce second prototype s'avèrent une fois encore convaincants et, au grand bonheur et à la surprise de ses concepteurs, plusieurs commandes sont enregistrées. Et ce qui n'était encore il y a trois ans qu'un rêve devient réalité ! Il est désormais temps de songer à une production en plus grande série. Pour cela, ils fondent au mois de mai 1899 " Les ateliers de constructions d'automobiles Turcat, Méry et Cie ". Une société en commandite par actions dans laquelle, volontairement, aucun actionnaire n'est majoritaire, Léon Turcat et Simon Méry étant les gérants de l'entreprise qui s`installe boulevard Michelet, à Marseille.
La situation financière et administrative réglée, l'étude d'une nouvelle voiture débute immédiatement, largement inspirée du précédent modèle sur lequei il est impératif de corriger certaines faiblesses, principalement sa fiabilité et son poids. C'est en 1901 que sort la voiture, une 16/20 HP, quatre cylindres, quatre vitesses qui atteint aisément les 80 km/h. Suivie, quelques mois plus tard, par une bi-cylindre de 8 HP. Plusieurs éléments ont été revus, notamment le réglage de l'admission qui permet dorénavant d'obtenir un meilleur ralenti et des petites vitesses sans à-coup, et surtout l'auto adopte un allumage électrique par magnéto en lieu et place de la bobine. Turcat-Méry étant l'une des premières marques automobiles françaises à proposer ce type d'allumage. C'est une rencontre fortuite entre Léon Turcat et Emil Jellineck qui est à l'origine de cette innovation majeure. A l'époque, Jellineck, consul autrichien résidant à Nice et amateur d'automobiles sportives, travaillait sur ce dispositif pour la firme allemande Daimler qui acceptera d'en livrer à la marque marseillaise, à charge pour Léon Turcat de le perfectionner et d'abandonner les droits de ses améliorations éventuelles. Ce qu'il fera d'ailleurs avec brio.

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Rapidement, la réputation des voitures Turcat-Méry dépasse les limites du sud de la France et la providence permet, une fois encore, à l'entreprise phocéenne de se développer. Lors du salon automobile parisien de 1901, Léon Turcat rencontre le baron Adrien de Turckheim, administrateur de la société alsacienne de Dietrich jusqu'alors spécialisée dans la construction ferroviaire, et qui cherche à diversifier ses activités en construisant, sous licence, des voitures dans ses ateliers situés à Lunéville. Un accord est conclu en février 1902 entre les deux parties, permettant ainsi à Turcat-Méry d'assainir ses finances et d'étaler son nom dans tout l'hexagone.


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Paris-Madrid 1903


Mais quelle meilleure publicité que les victoires en compétition ? Plusieurs voitures sont donc inscrites dans différentes épreuves, avec une première victoire au mois de mai dans la course de côte des Plâtrières à Aix-en-Provence. Et une suite de belles performances dans les courses de ville à ville Paris-Vienne et Paris-Madrid grâce, notamment, au pilote maison Henri-Louis Rougier. Ce dernier ajoute une nouvelle victoire lors de la course de côte du Mont Ventoux de 1903 avec une 45 HP, puis se classe troisième aux éliminatoires de la coupe Gordon Bennett, disputées l'année suivante sur le circuit des Ardennes Françaises au volant d'une voiture de plus de 12,8 litres de cylindrée surnommée " La Tarasque ". Le dessin, sur l'avant de la carrosserie, d'une gueule ouverte de laquelle jaillissent une série de dents acérées rappelle en effet " La Tarasque ",

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La "fameuse" Tarasque

Un monstre féroce qui, selon la légende, dévorait les jeunes filles sur les bords du Rhône, dans la région de... Tarascon ! Malheureusement, aussi féroce que soit la voiture, une crevaison et quelques ennuis mécaniques la privent d'un podium et Rougier doit se contenter de la quatrième place lors de cette quatrième édition de la coupe Gordon Bennett, courue sur le circuit de Taurus, en Allemagne.


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Mont Ventoux 1904

Ces bons résultats se traduisent immédiatement par une envolée des ventes, tant des voitures Turcat-Méry que de Dietrich, à tel point que Simon Méry doit s'installer à Lunéville pour superviser la fabrication des trois modèles Turcat-Méry sous licence, une bi-cylindre de 10 HP, et deux quatre cylindres de 16 et 24 HP. Avant de rejoindre Léon Turcat à Paris où résident désormais les deux hommes depuis l'ouverture d'une agence parisienne de la marque de Dietrich. L'usine de Marseille étant confiée à Louis Méry, l'un des frères de Simon.
Régulièrement, le catalogue des deux marques s'étoffe avec de nouveaux modèles qui perpétuent la tradition maison, désormais bien ancrée, de voitures de qualité, parfaitement bien finies, robustes et fiables, bénéficiant systématiquement des derniers progrès réalisés. Des modèles classiques, si l'on excepte une originale voiture à six roues (trois essieux avec l'essieu du milieu moteur) dont les essais ont lieu au mois de septembre 1905 sur les pentes très sélectives du Mont Ventoux. Et c'est la nouvelle société « Lorraine Dietrich » qui se charge de la construction de cet étonnant véhicule. Des divergences sont en effet apparues entre les différents membres de la famille de Turckheim et Adrien de Turckheim, préférant faire cavalier seul, a créé en 1905 la " Société Anonyme Lorraine des Anciens Etablissements de Dietrich de Lunéville ", plus communément appelée Lorraine- Dietrich, qui se limite à la construction automobile. Installée dans la banlieue parisienne, route de Bezons à Argenteuil (Seine-et- Oise), la nouvelle usine continue de fabriquer sous licence les voitures Turcat-Méry qui s'affirment de plus en plus auprès des automobilistes et le nouveau slogan, " La voiture des connaisseurs ", n'est absolument pas usurpé.
La 25CV de 1908...Avant-gardiste

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Turcat-Méry 25CVde 1911 qui gagne le rallye de Monaco

Victoire au premier Monte-Carlo !
En 1907, c'est une six cylindres de plus de 8 litres de cylindrée qui complète la gamme des quatre cylindres, mais elle ne restera disponible qu'une seule année au catalogue. Alors que des moteurs pour canots automobiles commencent à sortir des chaînes de montage et que l'étude d'un traîneau motorisé est abandonnée malgré des perspectives encourageantes.
Désormais bien implanté dans le monde de l'automobile, Turcat- Méry poursuit son petit bonhomme de chemin avec des « voitures légères comme une plume, élégantes comme une parisienne » comme le clament les différents catalogues de l'entreprise. Deux faits marquants vont néanmoins rompre la monotonie de la firme marseillaise. Tout d'abord Henri-Louis Rougier remporte, en 1911, le premier rallye de Monte-Carlo financé par la Société des Bains de Mer et présidé par le baron Van Zuylen, président de l'Automobile Club de France. Parti de Paris au volant d'une limousine de 75 HP carrossée par Labourdette, il entre en troisième position dans la principauté, mais après une nuit de délibération et de savants calculs de la part du jury, il sera crédité de la victoire au terme d'un classement qui prend en compte plusieurs critères, notamment la régularité de la voiture mais aussi son confort, sa vitesse ou encore la distance parcourue. Une superbe performance, même si le rallye ne connaît pas encore la renommée qui est la sienne aujourd'hui.
Mais cette année 1911 est surtout marquée par la scission entre Lorraine-Dietrich et Turcat-Méry, les types KG, KH et KI étant les dernières voitures construites à Argenteuil par Lorraine-Dietrich sous licence Turcat-Méry. L'augmentation de la production des voitures marseillaises, à environ 300 voitures par an, est peut-être à l'origine de la décision de ses dirigeants de vouloir continuer seuls ! Dans la foulée, la marque réalise son premier moteur monobloc inauguré avec le type LH de 18 HP. Et, à la veille de la Grande guerre, la gamme s'articule autour de cinq modèles dont la puissance s'échelonne de 14 HP pour le type LG, à 35 HP pour le type MJ de 6,3 litres de cylindrée. Un modèle qui s'offre, à l'occasion, quelques succès en compétition, principalement en course de côte comme au Mont Ventoux ou à Limonest, dans la banlieue lyonnaise. L'ensemble des voitures phocéennes est toujours d'une qualité irréprochable, chaque exemplaire étant encore assemblé méticuleusement et de façon très artisanale. Voire trop artisanale, ce qui se traduit par un prix de revient, et donc un prix de vente, souvent plus élevé que la concurrence. Mais Léon Turcat et Simon Méry semblent avoir relégué au second plan toute considération économique, privilégiant la satisfaction du client et le développement de certaines innovations. C'est ainsi que, pour s'ouvrir vers les pays tropicaux, Turcat-Méry développe des châssis qui peuvent être livrés rehaussés de plusieurs centimètres afin de pouvoir circuler indifféremment sur routes ou sur pistes. Dans un autre registre, Turcat-Méry propose la première voiture ayant les phares incorporés aux ailes. Un exercice de style discutable d'un point de vue esthétique mais qui témoigne de le volonté des deux constructeurs de vouloir explorer toutes les possibilités qu'offre l'automobile. Parfois au-delà du raisonnable, puisque Léon Turcat n'hésite pas à construire un châssis animé par un moteur d'avion d'une cylindrée de 12 ou 17 litres !

L'industrie automobile Marseillaise s'exporte au pays même de l'automobile qu'était l'Angleterre...Sachez que trés peu de voitures Françaises ont eu ce privilége (De Dion, Bugatti )

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Torpedo 1913 Luxe et Technique...On ne fait pas mieux à l'époque


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Tout est remis en cause avec !a déclaration de la première guerre mondiale. L'usine tourne tout d'abord au ralenti avant que lui soit confiée la fabrication de munitions. Deux petits camions sont également au programme, les types MH et NH de 18 et 20 HP. Les ateliers ont été entièrement réaménagés, agrandis, et une grande partie de l'outillage a dû être remplacée pour que l'usine participe, comme tant d'autres, à l'effort de guerre. Avec l'emploi de plusieurs milliers d'ouvriers, Léon Turcat découvre soudain le travail à la chaîne et envisage déjà des jours meilleurs avec la production en série de 1.000 châssis par an d'une voiture de tourisme moderne. Une nouvelle orientation pour l'entreprise qui emménage à la fin des hostilités dans de nouveaux et vastes bâtiments, 17 boulevard Michelet, à quelques mètres des anciens ateliers qui sont revendus à une société de mécanique générale. Un magasin est également ouvert sur les Champs Elysées.

Modéle unique construit pour le Duc de Montpensier en 1919....

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Il faut cependant attendre la fin de 1920 pour que soit commercialisée la nouvelle voiture qui doit relancer l'entreprise, une 15 CV à soupapes latérales de 3 litres de cylindrée, disponible en version torpédo ou conduite intérieure. Plusieurs contretemps ont cependant retardé sa sortie et la reprise s'annonce difficile. Les matières premières font cruellement défaut et les prix flambent. De plus, les investissements réalisés pour la nouvelle usine et le renouvellement de l'outillage ont considérablement amputé les finances de la société. Des difficultés financières apparaissent et le projet d'une 40 CV de prestige avorte avant même que son étude n'ait commencé. Contrairement à Simon et Louis Méry, Léon Turcat se sent, d'une certaine manière, responsable du déficit de la société et verse une somme considérable, prélevée sur sa fortune personnelle, pour tenter de renflouer la trésorerie. Mais les dettes sont trop importantes et le dépôt de bilan est inéluctable.
Au début de l'année 1921, les banques qui soutenaient l'entreprise presque depuis ses débuts, principalement la Société Marseillaise de Crédit, se portent acquéreur de la société qu'ils transforment en Société Anonyme. Henri Estier, I'ancien président, est maintenu à son poste mais sans véritable pouvoir décisionnel. Un pouvoir qui échappe également à Léon Turcat et Simon Méry, réduits au rang de simple employés. Avant d'être purement et simplement congédiés !


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Turcat-Méry RHG de 1923

L'ambiance est très morose du côté de la Cannebière, et la seconde place de Rougier dans le Grand Prix de Corse, puis les deux premières places dans leur catégorie des voitures Turcat- Méry dans la course de côte du Mont Ventoux en 1921 ne semblent pas apaiser l'atmosphère. La gamme des voitures de tourisme n'évolue pas, même si une version sportive extrapolée de la 15 HP apparaît en 1923, le type RGH. Il s'agit sans doute de la plus belle réussite de la marque, une quatre cylindres de 3 litres de cylindrée, simple arbre à cames en tête et chambres hémisphériques, double allumage, freins de série sur les quatre roues, 120 km/h, qui s'avère aussi belle que performante. Son seul défaut est, encore une fois, un prix de vente excessif par rapport à la concurrence, justifié d'après la direction de l'entreprise par l'installation en série de nombreux accessoires de qualité. Un argument qui ne convainct par la clientèle, qui boude cette voiture, tout de même maintenue trois ans au catalogue. En 1924, les difficultés financières resurgissent et, après avoir récupéré sa mise de fonds, la Société Marseillaise de Crédit cherche à se débarrasser d'un fardeau plutôt encombrant. C'est finalement Arthur Provenzal, agent et concessionnaire automobile, qui rachète la majorité des parts et devient le nouvel homme fort de l'entreprise dont la nouvelle raison sociale est la « Société anonyme des ateliers de construction automobiles Turcat-Méry », le poste de directeur revenant à Louis Mouren.
Grâce à ces deux hommes, l'activité reprend comme aux plus belles années de l'entreprise, et le type UG, une 12 CV de 2,4 litres de cylindrée, déclinée en version tourisme ou sport, devient le nouveau cheval de bataille de la marque. Et la cigale qui orne désormais le bouchon de radiateur des voitures leur donne des ailes puisque 17 victoires s'ajoutent au palmarès de la marque pour la seule année 1925. Des premières places acquises, pour la plupart, dans des courses de côte, La Faucille, le Mont Ventoux ou encore Limonest.
En 1927, Turcat-Méry investit le marché des véhicules populaires avec le type VD, une 7/8 CV de 1,2 litres de cylindrée. Un secteur déjà fortement saturé, de nombreuses marques se battant pour y gagner leurs galons, et la construction en série devenant une arme absolue. Handicapé par son prix de vente élevé, le type VD ne reçoit pas l'accueil espéré. Pas plus que le type VF de 10 CV. Le sursaut des deux dernières années n'était qu'un feu de paille, la trésorerie déjà précaire se dégrade considérablement. Pour limiter les investissements, la marque présente alors une gamme remaniée pour le salon de 1927, les voitures étant équipées de moteurs CIME et SCAP qui réduisent le prix de revient. Mais les types VD6, une six cylindres à moteur CIME de 9 CV à culbuteurs, ou de 11 CV à soupapes latérales, et WG8, une huit cylindres de 14 CV à moteur SCAP à soupapes en tête, ne parviennent pas à redresser la situation. Esseulé, découragé, confronté à trop de problèmes financiers, trop éloigné de la capitale où sont prises la majorité des décisions par les instances automobiles, Arthur Provenzal préfère jeter l'éponge et l'usine est placée en liquidation judiciaire en 1929. Avant d'être détruite !
Une fois de plus, le manque d'investissements nécessaires pour passer de la fabrication artisanale à la production en grande série aura eu raison de la ténacité de deux constructeurs entreprenants et inventifs. Un échec, comme tant d'autres, qui démontre que les compétences, les idées, les brevets déposés, les performances sportives ne pèsent finalement pas lourd face à la puissance de l'argent. Mais Léon Turcat a quitté le monde de l'automobile sans regrets. Comme il se plaisait à le raconter à ses enfants et petits-enfants, cette période de sa vie n'aura été qu'une franche partie de rigolade. Pour lui, la véritable révolution a eu lieu lorsque l'homme a inventé la bicyclette et a pu se séparer du cheval pour se déplacer. Quant au moteur et à l'automobile, ce n'était qu'un jeu, rien de plus ! Une façon comme une autre semble t’il de dissimuler une réelle et compréhensible amertume....En attendant que la dynastie Turca en décide autrement, mais ceci sera pour une prochaine fois


Regards sur Marseille - Pythéas - 29-08-2004

up!


Regards sur Marseille - chauvet - 29-08-2004

Shocking Shocking Shocking PUTShutup j'avais po vu!!!!!!!!!!!!!!!

chapeau bas MONSIEUR PYTHEAS ;) Applause

apres O.M METZ ça regonffle:ph34r:

j'aime bien la DS de mon cousin dans le passage de la lorette :D


Regards sur Marseille - pixie - 29-08-2004

:up
Quel boulot Applause
Tiens je pourrais mettre deux trois photos de la ville prises coté mer pour illustrer ce topic "Regards sur Marseille" une maigre contribution comparée à tes posts mais si ça vous branche... Rolleyes


Regards sur Marseille - Erby Kezako - 29-08-2004

ça c'est du topic !!!!

Comme 1 WE sur 3 je suis de permanence ce WE, bloqué à domicile près du téléphone. Merci de l'abréger par ces superbes histoires.....