27-09-2011, 10:16
Popper est ton ami
Dans "Les deux problèmes fondamentaux de la théorie de la connaissance" (K. Popper. Ed. Hermann) que sont pour Popper le problème de l'induction (ou "problème de Hume"), et le problème de la démarcation (ou "problème de Kant"), l'auteur précise que puisqu'aucune théorie universelle stricte n'est justifiable à partir d'un principe d'induction sans que cette justification ne sombre dans la régression à l'infini, ceci implique, notamment, qu'aucun énoncé de ce genre ne peut être vérifié sur la base d'un dénombrement d'énoncés particuliers.
Il s'ensuit qu'il faut donc considérer l'induction comme un « mythe » dans l'élaboration de toute connaissance objective, et que le passage à un autre mode d'évaluation des théories, devient, par cette voie, logiquement nécessaire : si l'on ne peut évaluer le contenu empirique des énoncés universels stricts de la Science, sur la base de leur sous-classe d'énoncés particuliers « permis » par eux, il est par contre possible de les évaluer à partir de tests permettant de confirmer ou d'infirmer l'occurrence d'un seul de leurs énoncés « interdits », ou, comme l'écrit Popper dans La logique de la découverte scientifique, les « falsificateurs potentiels » des énoncés universels stricts.
Pour Popper, le problème fondamental en philosophie des sciences est donc celui de la démarcation : c'est la question de la distinction entre ce qui relève de la science et ce qui relève de la métaphysique, sachant que pour Popper, son critère de démarcation est avant tout un critère permettant de distinguer deux types d'énoncés : scientifiques et métaphysiques. (D'où, par exemple, son opposition aux thèses du Cercle de Vienne, lesquelles proposaient d'éliminer complètement la métaphysique, « à tous les stades de l'élaboration de la science », alors que Popper défendait l'idée que toute science nécessite, à ses débuts, dans ses engagements ontologiques, des énoncés métaphysiques, lesquels doivent être, soit éliminés « progressivement », soit transformés en énoncés testables).
Pour comprendre ce problème, il s'interroge d'abord sur la place de l'induction dans la découverte scientifique : toutes les sciences[2] sont basées sur l'observation du monde. Comme cette observation est par nature partielle, la seule approche possible consiste à tirer des lois générales de ces observations (remarquons que c'est l'approche générale et fondamentale de tout organisme vivant qui apprend de son milieu). Si cette démarche permet d'avancer, elle ne garantit en aucun cas la justesse des conclusions. Pour Popper, il faut donc prendre au sérieux l'analyse de Hume qui montre l'invalidité fréquente de l'induction.
Par exemple, une collection d'observations (« Je vois passer des cygnes blancs ») ne permet jamais d'induire logiquement une proposition générale (« Tous les cygnes sont blancs »), car la présente observation ne dit rien des observations à venir. Il reste toujours possible qu'une seule observation contraire (« J'ai vu passer un cygne noir ») invalide la proposition générale.
Cette critique de l'induction conduit Popper à remettre en cause l'idée (que l'on attribue un peu rapidement à tous les positivistes) de vérification. Plutôt que de parler de « vérification » d'une hypothèse, Popper parlera de « corroboration », c’est-à-dire d'un test ou d'une séries de tests indépendants mais inscrits dans une tradition de recherche, et qu'une théorie testée aurait passée avec succès. Même par un grand nombre de tests, la corroboration ne permet pas de conclure à la « vérité » d'une hypothèse générale (supposée vérifiée pour toutes les observations jusqu'à la fin des temps). La corroboration, pour Popper, demeure donc une sorte de « vérité relative aux tests », et n'est jamais identifiable à une vérité absolue, ou un déterminisme absolu.
Une proposition scientifique n'est donc pas une proposition vérifiée (avec certitude) - ni même vérifiable par l'expérience (c'est-à-dire par l'intermédiaire de tests scientifiques) -, mais une proposition réfutable (ou falsifiable[3]) dont on ne peut affirmer qu'elle ne sera jamais réfutée. La proposition « Dieu existe » est pour Popper dotée de sens, mais elle n'est pas scientifique, car elle n'est pas réfutable. La proposition « Tous les cygnes sont blancs » est une conjecture scientifique. Si j'observe un cygne noir, cette proposition sera réfutée. C'est donc la démarche de conjectures et de réfutations qui permet de faire croître les connaissances scientifiques.
Il est par ailleurs important de souligner que pour Popper, aucune corroboration, ni même aucune réfutation ne peut être certaine. (Cf. K. Popper, in "Le réalisme et la science". Ed. Hermann), ce qui l'écarte de toute accusation de « falsificationnisme naïf ». La certitude d'une réfutation est impossible parce que les conditions initiales permettant d'échafauder les tests, dépendent, elles aussi, d'énoncés universels, et il est toujours possible de sauver une théorie d'une réfutation, grâce à des stratagèmes ad hoc. Mais ceci, loin d'être un défaut du critère de démarcation de Popper, représente au contraire une possibilité pour continuer la voie de la recherche, en imaginant des tests toujours plus sévères. Ce sont donc toujours en dernier ressort, des « décisions méthodologiques » reconnue par une communauté de chercheurs, qui permettent d'accepter ou de rejeter les résultats d'une corroboration ou d'une réfutation scientifique. Ceci est la raison pour laquelle, Popper précise que son critère de démarcation doit être compris comme étant un « critère méthodologique » de démarcation. (Cf. K. Popper. in "Le réalisme et la science", Ed. Hermann).
Dans cette démarche, la théorie doit donc précéder l'observation[4].
Il rejette cette méthode de l'induction et formule ainsi une critique méthodologique, indépendante de notre capacité à modéliser les raisonnements inductifs, l'induction étant un type de raisonnement courant d'un point de vue cognitif (voir à ce propos le théorème de Cox-Jaynes). Il va lui substituer le principe de la réfutabilité empirique (anglais : falsifiability). C'est ce principe qui va devenir le critère de démarcation entre science et non-science proposé par Popper.
Il peut être ainsi formulé : « Si on entend par énoncé de base un rapport d'observation, une théorie est dite scientifique si elle permet de diviser en deux sous-classes les énoncés de base :»
« la classe des énoncés qui la contredisent, appelés falsifieurs potentiels (si ces énoncés sont vrais, la théorie est fausse), »
« la classe des énoncés avec lesquels elle s'accorde (si ces énoncés sont vrais, ils la corroborent). »
Le critère de falsificabilité de Popper peut être apparenté dans son principe à un test de falsificabilité bayésien, hormis le fait qu'il travaille uniquement en logique discrète (vrai/faux) tandis que les bayésiens font varier les valeurs de vérité sur une plage continue de l'intervalle ]0;1[.
Le principe de réfutabilité de Popper a été critiqué notamment par Imre Lakatos (1922-1974) et Paul Feyerabend (1924-1994).
Dans "Les deux problèmes fondamentaux de la théorie de la connaissance" (K. Popper. Ed. Hermann) que sont pour Popper le problème de l'induction (ou "problème de Hume"), et le problème de la démarcation (ou "problème de Kant"), l'auteur précise que puisqu'aucune théorie universelle stricte n'est justifiable à partir d'un principe d'induction sans que cette justification ne sombre dans la régression à l'infini, ceci implique, notamment, qu'aucun énoncé de ce genre ne peut être vérifié sur la base d'un dénombrement d'énoncés particuliers.
Il s'ensuit qu'il faut donc considérer l'induction comme un « mythe » dans l'élaboration de toute connaissance objective, et que le passage à un autre mode d'évaluation des théories, devient, par cette voie, logiquement nécessaire : si l'on ne peut évaluer le contenu empirique des énoncés universels stricts de la Science, sur la base de leur sous-classe d'énoncés particuliers « permis » par eux, il est par contre possible de les évaluer à partir de tests permettant de confirmer ou d'infirmer l'occurrence d'un seul de leurs énoncés « interdits », ou, comme l'écrit Popper dans La logique de la découverte scientifique, les « falsificateurs potentiels » des énoncés universels stricts.
Pour Popper, le problème fondamental en philosophie des sciences est donc celui de la démarcation : c'est la question de la distinction entre ce qui relève de la science et ce qui relève de la métaphysique, sachant que pour Popper, son critère de démarcation est avant tout un critère permettant de distinguer deux types d'énoncés : scientifiques et métaphysiques. (D'où, par exemple, son opposition aux thèses du Cercle de Vienne, lesquelles proposaient d'éliminer complètement la métaphysique, « à tous les stades de l'élaboration de la science », alors que Popper défendait l'idée que toute science nécessite, à ses débuts, dans ses engagements ontologiques, des énoncés métaphysiques, lesquels doivent être, soit éliminés « progressivement », soit transformés en énoncés testables).
Pour comprendre ce problème, il s'interroge d'abord sur la place de l'induction dans la découverte scientifique : toutes les sciences[2] sont basées sur l'observation du monde. Comme cette observation est par nature partielle, la seule approche possible consiste à tirer des lois générales de ces observations (remarquons que c'est l'approche générale et fondamentale de tout organisme vivant qui apprend de son milieu). Si cette démarche permet d'avancer, elle ne garantit en aucun cas la justesse des conclusions. Pour Popper, il faut donc prendre au sérieux l'analyse de Hume qui montre l'invalidité fréquente de l'induction.
Par exemple, une collection d'observations (« Je vois passer des cygnes blancs ») ne permet jamais d'induire logiquement une proposition générale (« Tous les cygnes sont blancs »), car la présente observation ne dit rien des observations à venir. Il reste toujours possible qu'une seule observation contraire (« J'ai vu passer un cygne noir ») invalide la proposition générale.
Cette critique de l'induction conduit Popper à remettre en cause l'idée (que l'on attribue un peu rapidement à tous les positivistes) de vérification. Plutôt que de parler de « vérification » d'une hypothèse, Popper parlera de « corroboration », c’est-à-dire d'un test ou d'une séries de tests indépendants mais inscrits dans une tradition de recherche, et qu'une théorie testée aurait passée avec succès. Même par un grand nombre de tests, la corroboration ne permet pas de conclure à la « vérité » d'une hypothèse générale (supposée vérifiée pour toutes les observations jusqu'à la fin des temps). La corroboration, pour Popper, demeure donc une sorte de « vérité relative aux tests », et n'est jamais identifiable à une vérité absolue, ou un déterminisme absolu.
Une proposition scientifique n'est donc pas une proposition vérifiée (avec certitude) - ni même vérifiable par l'expérience (c'est-à-dire par l'intermédiaire de tests scientifiques) -, mais une proposition réfutable (ou falsifiable[3]) dont on ne peut affirmer qu'elle ne sera jamais réfutée. La proposition « Dieu existe » est pour Popper dotée de sens, mais elle n'est pas scientifique, car elle n'est pas réfutable. La proposition « Tous les cygnes sont blancs » est une conjecture scientifique. Si j'observe un cygne noir, cette proposition sera réfutée. C'est donc la démarche de conjectures et de réfutations qui permet de faire croître les connaissances scientifiques.
Il est par ailleurs important de souligner que pour Popper, aucune corroboration, ni même aucune réfutation ne peut être certaine. (Cf. K. Popper, in "Le réalisme et la science". Ed. Hermann), ce qui l'écarte de toute accusation de « falsificationnisme naïf ». La certitude d'une réfutation est impossible parce que les conditions initiales permettant d'échafauder les tests, dépendent, elles aussi, d'énoncés universels, et il est toujours possible de sauver une théorie d'une réfutation, grâce à des stratagèmes ad hoc. Mais ceci, loin d'être un défaut du critère de démarcation de Popper, représente au contraire une possibilité pour continuer la voie de la recherche, en imaginant des tests toujours plus sévères. Ce sont donc toujours en dernier ressort, des « décisions méthodologiques » reconnue par une communauté de chercheurs, qui permettent d'accepter ou de rejeter les résultats d'une corroboration ou d'une réfutation scientifique. Ceci est la raison pour laquelle, Popper précise que son critère de démarcation doit être compris comme étant un « critère méthodologique » de démarcation. (Cf. K. Popper. in "Le réalisme et la science", Ed. Hermann).
Dans cette démarche, la théorie doit donc précéder l'observation[4].
Il rejette cette méthode de l'induction et formule ainsi une critique méthodologique, indépendante de notre capacité à modéliser les raisonnements inductifs, l'induction étant un type de raisonnement courant d'un point de vue cognitif (voir à ce propos le théorème de Cox-Jaynes). Il va lui substituer le principe de la réfutabilité empirique (anglais : falsifiability). C'est ce principe qui va devenir le critère de démarcation entre science et non-science proposé par Popper.
Il peut être ainsi formulé : « Si on entend par énoncé de base un rapport d'observation, une théorie est dite scientifique si elle permet de diviser en deux sous-classes les énoncés de base :»
« la classe des énoncés qui la contredisent, appelés falsifieurs potentiels (si ces énoncés sont vrais, la théorie est fausse), »
« la classe des énoncés avec lesquels elle s'accorde (si ces énoncés sont vrais, ils la corroborent). »
Le critère de falsificabilité de Popper peut être apparenté dans son principe à un test de falsificabilité bayésien, hormis le fait qu'il travaille uniquement en logique discrète (vrai/faux) tandis que les bayésiens font varier les valeurs de vérité sur une plage continue de l'intervalle ]0;1[.
Le principe de réfutabilité de Popper a été critiqué notamment par Imre Lakatos (1922-1974) et Paul Feyerabend (1924-1994).