27-09-2011, 18:48
Déconstructivisme
Qu'est-ce que le déconstructivisme?
Le déconstructivisme est un mouvement de pensée philosophique, fortement influencé par la linguistique. Jacques Derridaen est le plus célébre penseur.
Mais c'est dans l’architecture que les manifestations de la déconstruction sont les plus visibles : formes brisées, déchiquetées, asymétriques et mal proportionnées, évoquant la destruction physique.
En architecture, le déconstructivisme est analysé pour la première fois en 1988 par Marc Wigley à l'occasion d'une exposition au MOMA. Sous ce nom, il rassemble les oeuvres de Frank Gehry, Daniel Libeskind, Rem Koolhaas, Peter Eisenman, Zaha Hadid, Bernard Tschumi et du collectif Coop Himmelblau.
«La déconstruction est un "texte suspendu". Elle ne cherche pas les fondations des parties visibles de l'édifice. Elle s'attaque aux causes qui mènent de l'origine à la fin de façon linéaire, et ceci car elle considère que les deux cohabitent en permanence. Son travail consiste en une lecture de la fin vers l'origine et vice-versa. Ce mouvement de va et vient de la lecture devient une philosophie à l'œuvre, un travail d'écriture qui poursuit la lecture.
La déconstruction est une critique non pas négative mais productive. "La déconstruction est inventive ou elle n'est pas (…) sa démarche engage une affirmation." Elle veut inventer l'impossible. »
PIERRE GRENIER, Pourquoi déconstruire l'architecture?
Appliquant les principes de la déconstructions, Zaha Hadid use de nouvelles formes, propose une architecture ouverte sur le monde, audacieuse et aérienne. Son style est principalement caractérisé par une propension pour les entrelacs de lignes tendues et de courbes, les formes pointues et la superposition de plans,qui donnent à ses créations complexité et légèreté. Son architecture ne rompt jamais avec l’urbanisme, mais, au contraire, s’intègre parfaitement à l’environnement.
Les enjeux de la déconstruction:L'art désengagé et la fin des idéologies
«Les trois dernières formes décelables à l'intérieur du postmodernisme architectural sont bien plus intéressantes. En particulier parce que toutes maintiennent et assument clairement une ambition forte de créativité et d'innovation, et cela sur base d'une critique de la modernité, souvent d'ailleurs considérée comme n'ayant pas véritablement honoré ses ambitions.
S'il existe des éléments qui permettent de les rassembler, sans doute les trouverait-on d'une part dans leur commune critique de la raison (même si celle-ci s'opère sur des bases différentes) et, d'autre part, dans leur abandon, plus ou moins clairement assumé, de coupler l'ambition d'émancipation esthétique à un projet d'émancipation socio-politique. Un abandon qui confine parfois, comme chez R. Koolhaas, à une acceptation cynique de la réalité.
L'esthétique du déconstructivisme apparaît clairement comme une esthétique de la négativité. Il ne s'agit pas, contrairement au modernisme architectural, de promettre un nouveau style, une nouvelle cohérence, encore moins de s'appuyer sur un projet social ou utopique. Le constat socio-politique est bien celui de la fin des idéologies, tel que le théorisera Jean-François Lyotard. C'est pourquoi le déconstructivisme refuse l'appellation avant-gardiste. “ Even though it thraetens this most fundamental property of architectural objects, deconstructivist architecture does not constitute an avant-garde. It is not a rhetoric of the new... It exploits the weaknesses in the tradition in order to disturb rather than overthrow it. ”(M. Wigley). On retrouve l'image de la déconstruction, telle que la théorisera Derrida. Voir en particulier J. Derrida, Marges de la philosophie, Minuit, Paris, p. 162 s..
Le travail des déconstructivistes s'opérera ainsi autour d'une volonté de transgression systématique des codes architecturaux qui ont fait aussi bien le classicisme que le modernisme architectural: centralité, hiérarchie, fonctionnalité (on connaît ainsi les piliers ou les escaliers non fonctionnels de certaines maisons de Eisenman), symétrie, gravité... »
"IMAGINATION RADICALE"
Sa pratique, elle, peut se résumer à quelques principes simples : "Repousser constamment les limites de l'architecture et de l'urbanisme"; "Expérimenter sans cesse de nouveaux concepts spatiaux"; "Renforcer les paysages urbains existants en proposant une nouvelle esthétique de la ville". Ce que son partenaire, Patrik Schumacher, résume par les termes "Imagination radicale".
Sa pensée, il faut plutôt la lire dans l'incroyable profusion de dessins, déshumanisés par l'usage de l'informatique, qu'elle livre pour chaque concours, ou simplement pour son plaisir, et dans les textes que ses contemporains lui consacrent avec délectation : Greg Lynn, Peter Cook, Gordana Fontana-Giusti et Andreas Ruby pour la dernière mouture de ses œuvres complètes, publiée comme un grand livre-jeu pour adultes sous un emballage de plastique. Comme dans la plupart des ouvrages qui touchent à son travail ou à son image, elle cherche à garder le contrôle, à imposer cette griffe qui en fait un trésor vivant en Grande-Bretagne, à l'égal de Norman Foster, Richard Rodgers ou de Philippe Stark. Un statut qui repose sur des doses variables d'originalité, de mutisme, de snobisme, d'énergie et, dans tous les cas, d'individualisme forcené.
"La plus belle chose de mon agence, dit-elle, c'est sa dimension de recherche, pas une recherche fondée sur l'application de solutions déjà connues, mais une façon d'étudier les dessins de ville assez longuement pour imaginer de nouveaux développements."
Au-delà de la flexibilité de ses projets, on retrouve des constances : l'usage du béton qui lui permet d'envisager les formes les plus opposées aux lois ordinaires de la gravité pour obéir à celle d'une joyeuse légèreté, Et puis des plis, des angles, des enroulements, des traits nets, acérés, tout un langage qui aurait pu rester de l'ordre de la science-fiction sans des personnalités comme elle, Frank Gehry ou Enric Miralles. Avec le risque qu'implique tout catalogue formel, si étendu soit-il, celui d'un style qui tourne à la répétition de trois ou quatre stéréotypes.
Depuis 2001, la carrière de Zaha Hadid, dont tous les détails, vêtements, propos publics et conférences sont élaborés comme un objet de marketing destiné à conquérir les plus vastes marchés, a pris une formidable dimension. Cette mondialisation d'un modèle architectural est ce qui la rapproche d'un Norman Foster, susceptible, comme elle, d'adapter son style high-tech sous toutes les latitudes. Comme les vins charpentés et boisés qu'a universalisés le guide de Robert Parker, l'architecture selon Hadid, a fait oublier son propos radical, par ses qualités plastiques en premier lieu, mais aussi par son caractère répétitif, facilement reconnaissable.
Cela convient aux maîtres d'ouvrage et aux commanditaires. Aux Etats-Unis, il fallait au pied de chaque gratte-ciel un Miro, un Calder ou un Lichtenstein. Puis la sculpture a investi l'architecture et chaque ville a voulu son Gehry. Toute collection étant appelée à s'étendre, il leur faut maintenant d'autres signes faciles à partager, comme la magie de cette architecte venue du pays des Mille et Une Nuits.
La poésie architecturale de l'angle non droit:
Elle bannit toute idée de bâti à angle droit. Prône les formes fluides, flottantes, sinusoidales. Des diagonales, des stalactites, des torsions ou des strates. Elle fait rêver et croire à une nouvelle manière de vivre, située à la jonction de l'architecture, de l'art et du design. Tel est le choix de Zaha Hadid. Le dessin se libère du “té” et de l’équerre.
On pourrait songer alors aux oeuvres du peintre Paul Klee. Celui-ci a toujours respecté l’orthogonalité des supports (feuilles de dessin, tableaux). Mais il a le plus souvent interposé entre le cadre “normal” et ses formes un cadre dynamique dont la fonction était de calmer la dureté de la convention. A quoi bon utiliser l’angle droit quand on peut faire autrement?
Qu'est-ce que le déconstructivisme?
Le déconstructivisme est un mouvement de pensée philosophique, fortement influencé par la linguistique. Jacques Derridaen est le plus célébre penseur.
Mais c'est dans l’architecture que les manifestations de la déconstruction sont les plus visibles : formes brisées, déchiquetées, asymétriques et mal proportionnées, évoquant la destruction physique.
En architecture, le déconstructivisme est analysé pour la première fois en 1988 par Marc Wigley à l'occasion d'une exposition au MOMA. Sous ce nom, il rassemble les oeuvres de Frank Gehry, Daniel Libeskind, Rem Koolhaas, Peter Eisenman, Zaha Hadid, Bernard Tschumi et du collectif Coop Himmelblau.
«La déconstruction est un "texte suspendu". Elle ne cherche pas les fondations des parties visibles de l'édifice. Elle s'attaque aux causes qui mènent de l'origine à la fin de façon linéaire, et ceci car elle considère que les deux cohabitent en permanence. Son travail consiste en une lecture de la fin vers l'origine et vice-versa. Ce mouvement de va et vient de la lecture devient une philosophie à l'œuvre, un travail d'écriture qui poursuit la lecture.
La déconstruction est une critique non pas négative mais productive. "La déconstruction est inventive ou elle n'est pas (…) sa démarche engage une affirmation." Elle veut inventer l'impossible. »
PIERRE GRENIER, Pourquoi déconstruire l'architecture?
Appliquant les principes de la déconstructions, Zaha Hadid use de nouvelles formes, propose une architecture ouverte sur le monde, audacieuse et aérienne. Son style est principalement caractérisé par une propension pour les entrelacs de lignes tendues et de courbes, les formes pointues et la superposition de plans,qui donnent à ses créations complexité et légèreté. Son architecture ne rompt jamais avec l’urbanisme, mais, au contraire, s’intègre parfaitement à l’environnement.
Les enjeux de la déconstruction:L'art désengagé et la fin des idéologies
«Les trois dernières formes décelables à l'intérieur du postmodernisme architectural sont bien plus intéressantes. En particulier parce que toutes maintiennent et assument clairement une ambition forte de créativité et d'innovation, et cela sur base d'une critique de la modernité, souvent d'ailleurs considérée comme n'ayant pas véritablement honoré ses ambitions.
S'il existe des éléments qui permettent de les rassembler, sans doute les trouverait-on d'une part dans leur commune critique de la raison (même si celle-ci s'opère sur des bases différentes) et, d'autre part, dans leur abandon, plus ou moins clairement assumé, de coupler l'ambition d'émancipation esthétique à un projet d'émancipation socio-politique. Un abandon qui confine parfois, comme chez R. Koolhaas, à une acceptation cynique de la réalité.
L'esthétique du déconstructivisme apparaît clairement comme une esthétique de la négativité. Il ne s'agit pas, contrairement au modernisme architectural, de promettre un nouveau style, une nouvelle cohérence, encore moins de s'appuyer sur un projet social ou utopique. Le constat socio-politique est bien celui de la fin des idéologies, tel que le théorisera Jean-François Lyotard. C'est pourquoi le déconstructivisme refuse l'appellation avant-gardiste. “ Even though it thraetens this most fundamental property of architectural objects, deconstructivist architecture does not constitute an avant-garde. It is not a rhetoric of the new... It exploits the weaknesses in the tradition in order to disturb rather than overthrow it. ”(M. Wigley). On retrouve l'image de la déconstruction, telle que la théorisera Derrida. Voir en particulier J. Derrida, Marges de la philosophie, Minuit, Paris, p. 162 s..
Le travail des déconstructivistes s'opérera ainsi autour d'une volonté de transgression systématique des codes architecturaux qui ont fait aussi bien le classicisme que le modernisme architectural: centralité, hiérarchie, fonctionnalité (on connaît ainsi les piliers ou les escaliers non fonctionnels de certaines maisons de Eisenman), symétrie, gravité... »
"IMAGINATION RADICALE"
Sa pratique, elle, peut se résumer à quelques principes simples : "Repousser constamment les limites de l'architecture et de l'urbanisme"; "Expérimenter sans cesse de nouveaux concepts spatiaux"; "Renforcer les paysages urbains existants en proposant une nouvelle esthétique de la ville". Ce que son partenaire, Patrik Schumacher, résume par les termes "Imagination radicale".
Sa pensée, il faut plutôt la lire dans l'incroyable profusion de dessins, déshumanisés par l'usage de l'informatique, qu'elle livre pour chaque concours, ou simplement pour son plaisir, et dans les textes que ses contemporains lui consacrent avec délectation : Greg Lynn, Peter Cook, Gordana Fontana-Giusti et Andreas Ruby pour la dernière mouture de ses œuvres complètes, publiée comme un grand livre-jeu pour adultes sous un emballage de plastique. Comme dans la plupart des ouvrages qui touchent à son travail ou à son image, elle cherche à garder le contrôle, à imposer cette griffe qui en fait un trésor vivant en Grande-Bretagne, à l'égal de Norman Foster, Richard Rodgers ou de Philippe Stark. Un statut qui repose sur des doses variables d'originalité, de mutisme, de snobisme, d'énergie et, dans tous les cas, d'individualisme forcené.
"La plus belle chose de mon agence, dit-elle, c'est sa dimension de recherche, pas une recherche fondée sur l'application de solutions déjà connues, mais une façon d'étudier les dessins de ville assez longuement pour imaginer de nouveaux développements."
Au-delà de la flexibilité de ses projets, on retrouve des constances : l'usage du béton qui lui permet d'envisager les formes les plus opposées aux lois ordinaires de la gravité pour obéir à celle d'une joyeuse légèreté, Et puis des plis, des angles, des enroulements, des traits nets, acérés, tout un langage qui aurait pu rester de l'ordre de la science-fiction sans des personnalités comme elle, Frank Gehry ou Enric Miralles. Avec le risque qu'implique tout catalogue formel, si étendu soit-il, celui d'un style qui tourne à la répétition de trois ou quatre stéréotypes.
Depuis 2001, la carrière de Zaha Hadid, dont tous les détails, vêtements, propos publics et conférences sont élaborés comme un objet de marketing destiné à conquérir les plus vastes marchés, a pris une formidable dimension. Cette mondialisation d'un modèle architectural est ce qui la rapproche d'un Norman Foster, susceptible, comme elle, d'adapter son style high-tech sous toutes les latitudes. Comme les vins charpentés et boisés qu'a universalisés le guide de Robert Parker, l'architecture selon Hadid, a fait oublier son propos radical, par ses qualités plastiques en premier lieu, mais aussi par son caractère répétitif, facilement reconnaissable.
Cela convient aux maîtres d'ouvrage et aux commanditaires. Aux Etats-Unis, il fallait au pied de chaque gratte-ciel un Miro, un Calder ou un Lichtenstein. Puis la sculpture a investi l'architecture et chaque ville a voulu son Gehry. Toute collection étant appelée à s'étendre, il leur faut maintenant d'autres signes faciles à partager, comme la magie de cette architecte venue du pays des Mille et Une Nuits.
La poésie architecturale de l'angle non droit:
Elle bannit toute idée de bâti à angle droit. Prône les formes fluides, flottantes, sinusoidales. Des diagonales, des stalactites, des torsions ou des strates. Elle fait rêver et croire à une nouvelle manière de vivre, située à la jonction de l'architecture, de l'art et du design. Tel est le choix de Zaha Hadid. Le dessin se libère du “té” et de l’équerre.
On pourrait songer alors aux oeuvres du peintre Paul Klee. Celui-ci a toujours respecté l’orthogonalité des supports (feuilles de dessin, tableaux). Mais il a le plus souvent interposé entre le cadre “normal” et ses formes un cadre dynamique dont la fonction était de calmer la dureté de la convention. A quoi bon utiliser l’angle droit quand on peut faire autrement?