16-12-2018, 17:59
Toulouse - OM... UNE BONNE RECETTE TO LOSE !
TOUTE RESSEMBLANCE AVEC DES FAITS ANALOGUES... IS VERY FOR TWEETS !
La Mairie, propriétaire du terrain, avait bien fait les choses. Un opérateur privé étranger avait mis à disposition un budget, presque sans limite, pour ce projet pharaonique. Imaginez déjà simplement la réaction du public à la lecture de la plaquette qui annonçait l'édification, en plein centre ville, du plus grand auditorium d'Europe ! Les U Arena de la planète n'avaient qu'à bien se tenir. Une enceinte ultramoderne, constituée des matières les plus nobles, dotée des matériaux les plus précieux. Tout convergeait vers la même intention : réussir un lieu incontournable pour égayer nos principaux sens, et valoriser la qualité du partenariat avec ces investisseurs hors norme.
https://o.aolcdn.com/images/dims3/GLOB/l...28x314.jpg
Respectant budget et planning, la réalisation fut sans faille. Lors des visites de contrôle, rien de notable ne fut relevé ; si ce n'est la minutieuse organisation. La Mairie prodigua une grande attention pour accueillir ses hôtes, au fur et à mesure de l'avancement du projet.
https://media.paperblog.fr/i/280/2805484...r-L-1.jpeg
Enfin vint le grand jour de l'inauguration. Les cartons d'invitation franchirent tous les barrages. Le gratin espéré fut au rendez-vous. Pas un absent de marque. Les petits fours rencontrèrent un immense succès. Les vins les plus fins, les champagnes les plus exquis coulèrent à flot. Tant de monde dans une salle si vaste ne posa aucun problème. Néanmoins un seul bémol détonna un peu : le mini-spectacle lyrique, sensé accompagner cette inauguration, fut un peu perturbé par le brouhaha ambiant, fruit des coupes remplies et vidées à grande vitesse. Un auditorium se devant de profiter du silence des ses spectateurs, cette première alerte fut rapidement évacuée.
Toutefois, le Maire, souhaitant avant toute chose se prémunir de couacs éventuels, nomma un directeur général, débauché dans une très grande entreprise, missionné pour couvrir l'opérationnel. Fort de cet appui d'un bras droit de haut niveau, le Maire repartit à ses autres activités, sûr que ses consignes seraient diligentées avec zèle.
Le Directeur général, prit comme première mesure d'engager un chef d'orchestre de renom, qu'il chipa à la Scala de Milan.
"-Cher ami, lui dit-il, je vais mettre à votre disposition les meilleurs musiciens du monde. Laissez-moi juste procéder à leur recrutement."
Une équipe du scouts musicaux fut dépêchée à travers toute la planète. Dès qu'un jeune prodige était repéré, ses parents faisaient l'objet d'assauts des plus alléchants pour leur progéniture. Les plus grands solistes de la terre furent approchés. À force d'efforts financiers considérables, pianistes, violonistes, contrebassistes, clarinettistes et autres spécialistes émérites furent réunis sous la bannière du grand auditorium.
http://www.tristanlegovic.eu/diellou/ske...keuden.jpg
Le chef d'orchestre put commencer son œuvre : constituer le plus brillant orchestre de tous les temps, afin qu'il se produise dans le plus grand auditorium d'Europe. Puis, resta à définir quelle Œuvre ouvrirait la saison symphonique. Il fallait que cela soit un évènement. Cinquante musicologues, parmi les plus réputés constituèrent un groupe de réflexion chargé de désigner une sélection de trois morceaux de choix. Après moultes conciliabules, il s'avéra qu'une œuvre supplantait toute les autres : la pièce maîtresse et néanmoins méconnue du grand Frantz Liszt, "La Faust Symphonie" fut définitivement liée à l'ouverture de la saison du déjà célèbre auditorium.
Moins connue, plus riche, rarement représentée, honorée par les Chefs les plus illustres tels Leonard Bernstein ou Georges Solti, elle confinait à l'extase musicale et convenait ô combien à l'évènement recherché par a Mairie.
https://www.youtube.com/watch?v=84_pjz26mF8
Le Maire, lui-même, malgré une culture de mélomane des plus discutables se prit à déclamer ces quelques vers dans la langue de Gœthe :
Alles Vergängliche ist nur ein Gleichnis;
Das Unzulängliche, hier wird's Ereignis;
Das Unbeschreibliche, hier ist es getan;
Das Ewig weibliche zieht uns hinan.
L'accent laissait à désirer, mais les germanophone purent comprendre quoi il était question :
« L'éphémère n'est rien qu'une image ; l'inaccessible ici, n'est plus hors d'atteinte ; l'indescriptible ici, est accompli ; l'éternel féminin nous élève vers les sommets. »
Après de longues semaines de répétitions, marquées par la présence presque constante de nombreux journalistes accompagnés de mélomanes de toutes origines, la date de l'inauguration officielle fut actée. Toute la ville bruissait à l'approche de l'évènement.
Quelques couacs virent toutefois troubler les derniers jours de préparation. Une émanation de gaz méthane, dont l'origine était inconnue (au dires du Directeur Général) força l'orchestre à ajuster les dernières touches du concert en plein air. Heureusement le climat du mois de juin se prêtait à l'exercice. Mais la légère brise perturba les partitions... La valeur acoustique ne put être démontrée... Les services de la Mairie déclenchèrent un plan d'assainissement du lieu. Quelques journalistes évoquèrent l'ancienne carrière située sous le terrain sur lequel avait été édifié l'auditorium. Le Maire affirma que toutes les mesures sanitaires, couplées à un strict respect de la règlementation, avaient été prises.
Bref, après ce fâcheux contretemps, le jour fatidique advint. Un cordon de police entoura l'auditorium, un service de voituriers facilita l'accès aux nombreux VIP, des hôtesses guidèrent les invités à leurs fauteuils. Le public, excité de vivre en direct ce rare moment, bourdonnait d'allégresse ! Les dernières minutes produirent un sacré tintamarre... Un groupe d'invités, plus guillerets que la moyenne des présents, lança un retentissant : " WE WANT SHOW ! " scandant cette demande en tapant des pieds sur le sol. Le bruit qu'il déclanchèrent fit des adeptes. Bientôt une bonne partie de la salle, par jeux, se prit à réclamer également le début de la manifestation ! L'auditorium tremblait sous cet impact que les architectes étaient loin d'avoir entrevu pour un tel établissement.
Pendant ce temps, la fosse d'orchestre se remplissait. Les instruments, les solistes, les partitions, les premiers ajustements, les derniers réglages. La routine du concert se déployait.
Le public se calma progressivement. Le Maire choisit cet instant pour venir sur scène et s'approcha du micro installé par un homme de l'ombre. Quelques secondes de silence précédèrent une salve d'applaudissements. Le discours du premier élu fut des plus sobres. Il ne put toutefois s'empêcher de narrer par le menu l'historique du projet qui voyait le jour après tant d'efforts. il fit un louable panégyrique de ses sponsors... Il se contint tout de même à ne pas dépasser les quinze minutes qu'il s'était fixée. Après des applaudissements plus mesurés, il quitta la scène et rendit discrètement visite aux musiciens. Il s'entretint longuement avec les solistes, vantant l'un, louant le second, flagornant le troisième... Créant sans le savoir la cacophonie à venir... Une fois les ego chauffés à blanc, le noir se fit. Ce noir sidéral, alors que quelques sons s'élevaient encore de la fosse d'orchestre, quelques réglages d'instruments...
C'en fut trop pour les excités du premier rang : ils reprirent de plus belle leur " WE WANT SHOW ! " Cette fois, l'intégralité du public se joignit aux perturbateurs. Les tremblements furent grandement amplifiés et on put mesurer la qualité acoustique, même sans micro !
Quelques imperceptibles émanations de gaz chatouillèrent les narines les plus raffinées. Peu y portèrent attention tant les regards et les ouies captaient toutes les centrations. La psychologie cybernétique passait par là en cet instant historique !
Un discret faisceau lumineux vint cueillir le Chef d'orchestre marchant vers ses ouailles. Celles-ci se levèrent derechef ! Les cris de la salles se métamorphosèrent en applaudissement soutenus, puis après qu'il eut salué son auditoire, le chef d'orchestre s'immobilisa. Un silence épais recouvrit tout l'auditorium et les premiers mouvements entraînèrent l'auditoire dans un voyage sans lendemain. L'introduction, assez lugubre empruntait Wagner, puis elle se déplaçait chez Berlioz, chacun révisait ses classiques. Le méthane, plus léger que l'air, s'élevait de concert !... Emportés par les vagues chromatiques, nombreux furent ceux qui , emportés par l'émotion romantique se dégageant de l'œuvre, inspirèrent à pleins poumons.
La psychologie cybernétique repassa par là et décentra les oreilles et les cœurs au profit de ce choc olfactif ! Chacun se tourna vers son voisin, l'interrogeant du regard...
Pendant ce temps dans la fosse, un premier violon s'avança pour donner plus de visibilité à son action. Le Chef d'orchestre, surpris par cet acte égocentrique condamna d'un regard appuyé cette mise en avant. Les clarinettes se tournèrent vers l'impétrant qui sous l'assaut recula. Tout sembla rentrer dans l'ordre jusqu'à ce que le second violon procède de même au grand désarroi de son premier collègue. Ce dernier, fort dignement, posa son instruments sur sa chaise et se dirigea dans les travées vers la loge du Maire. La Faust Symphonie continua néanmoins malgré les toux répétitives du premier rang. Tandis que les hautbois dispensaient leur nostalgie, quelques personnes, plus incommodées que les autres par les émanations, se levèrent et quittèrent la salle. Le Chef d'Orchestre, tout à son œuvre — bien qu'indisposé par ces vagues méthanières — contint son intoxication progressive, au nom de l'Art.
Dignement, malgré les odeurs insupportables, les musiciens remplirent leurs obligations, sans grande conviction. Pour ne pas s'étouffer, inutile d'assister à la fin de l'exécution cette superbe pièce musicale...
Le Maire, dans sa loge, protégé par cette alcôve, n'avait comme essentiel souci que de consoler le premier violon. Son transfert dans l'Orchestre, en plus d'être philharmonique, s'était révélé d'un coût pharaonique !
La salle se vida si rapidement que les passages plus doux du milieu de l'œuvre furent couverts par les piétinements du public cherchant la sortie. Quand les choristes rejoignirent la scène pour la fin de la symphonie, aucune des personnalités invitées n'assista à ce final réputé exceptionnel.
Les semaines suivantes, pour se consoler, le Maire lut et relut la foison d'articles de presse ayant vanté l'évènement à venir.
Le sponsor étranger de l'auditorium décida derechef qu'il fallait changer le Directeur Général, voire le Chef d'Orchestre. Le nom de trois nouveaux solistes fut fortement recommandé.
Bref, on allait voir ce qu'on allait voir et on allait entendre ce qu'on allait entendre !
FIN
Toulouse - OM Dimanche 11 mars 2018 21 heures Canal +
TOUTE RESSEMBLANCE AVEC DES FAITS ANALOGUES... IS VERY FOR TWEETS !
La Mairie, propriétaire du terrain, avait bien fait les choses. Un opérateur privé étranger avait mis à disposition un budget, presque sans limite, pour ce projet pharaonique. Imaginez déjà simplement la réaction du public à la lecture de la plaquette qui annonçait l'édification, en plein centre ville, du plus grand auditorium d'Europe ! Les U Arena de la planète n'avaient qu'à bien se tenir. Une enceinte ultramoderne, constituée des matières les plus nobles, dotée des matériaux les plus précieux. Tout convergeait vers la même intention : réussir un lieu incontournable pour égayer nos principaux sens, et valoriser la qualité du partenariat avec ces investisseurs hors norme.
https://o.aolcdn.com/images/dims3/GLOB/l...28x314.jpg
Respectant budget et planning, la réalisation fut sans faille. Lors des visites de contrôle, rien de notable ne fut relevé ; si ce n'est la minutieuse organisation. La Mairie prodigua une grande attention pour accueillir ses hôtes, au fur et à mesure de l'avancement du projet.
https://media.paperblog.fr/i/280/2805484...r-L-1.jpeg
Enfin vint le grand jour de l'inauguration. Les cartons d'invitation franchirent tous les barrages. Le gratin espéré fut au rendez-vous. Pas un absent de marque. Les petits fours rencontrèrent un immense succès. Les vins les plus fins, les champagnes les plus exquis coulèrent à flot. Tant de monde dans une salle si vaste ne posa aucun problème. Néanmoins un seul bémol détonna un peu : le mini-spectacle lyrique, sensé accompagner cette inauguration, fut un peu perturbé par le brouhaha ambiant, fruit des coupes remplies et vidées à grande vitesse. Un auditorium se devant de profiter du silence des ses spectateurs, cette première alerte fut rapidement évacuée.
Toutefois, le Maire, souhaitant avant toute chose se prémunir de couacs éventuels, nomma un directeur général, débauché dans une très grande entreprise, missionné pour couvrir l'opérationnel. Fort de cet appui d'un bras droit de haut niveau, le Maire repartit à ses autres activités, sûr que ses consignes seraient diligentées avec zèle.
Le Directeur général, prit comme première mesure d'engager un chef d'orchestre de renom, qu'il chipa à la Scala de Milan.
"-Cher ami, lui dit-il, je vais mettre à votre disposition les meilleurs musiciens du monde. Laissez-moi juste procéder à leur recrutement."
Une équipe du scouts musicaux fut dépêchée à travers toute la planète. Dès qu'un jeune prodige était repéré, ses parents faisaient l'objet d'assauts des plus alléchants pour leur progéniture. Les plus grands solistes de la terre furent approchés. À force d'efforts financiers considérables, pianistes, violonistes, contrebassistes, clarinettistes et autres spécialistes émérites furent réunis sous la bannière du grand auditorium.
http://www.tristanlegovic.eu/diellou/ske...keuden.jpg
Le chef d'orchestre put commencer son œuvre : constituer le plus brillant orchestre de tous les temps, afin qu'il se produise dans le plus grand auditorium d'Europe. Puis, resta à définir quelle Œuvre ouvrirait la saison symphonique. Il fallait que cela soit un évènement. Cinquante musicologues, parmi les plus réputés constituèrent un groupe de réflexion chargé de désigner une sélection de trois morceaux de choix. Après moultes conciliabules, il s'avéra qu'une œuvre supplantait toute les autres : la pièce maîtresse et néanmoins méconnue du grand Frantz Liszt, "La Faust Symphonie" fut définitivement liée à l'ouverture de la saison du déjà célèbre auditorium.
Moins connue, plus riche, rarement représentée, honorée par les Chefs les plus illustres tels Leonard Bernstein ou Georges Solti, elle confinait à l'extase musicale et convenait ô combien à l'évènement recherché par a Mairie.
https://www.youtube.com/watch?v=84_pjz26mF8
Le Maire, lui-même, malgré une culture de mélomane des plus discutables se prit à déclamer ces quelques vers dans la langue de Gœthe :
Alles Vergängliche ist nur ein Gleichnis;
Das Unzulängliche, hier wird's Ereignis;
Das Unbeschreibliche, hier ist es getan;
Das Ewig weibliche zieht uns hinan.
L'accent laissait à désirer, mais les germanophone purent comprendre quoi il était question :
« L'éphémère n'est rien qu'une image ; l'inaccessible ici, n'est plus hors d'atteinte ; l'indescriptible ici, est accompli ; l'éternel féminin nous élève vers les sommets. »
Après de longues semaines de répétitions, marquées par la présence presque constante de nombreux journalistes accompagnés de mélomanes de toutes origines, la date de l'inauguration officielle fut actée. Toute la ville bruissait à l'approche de l'évènement.
Quelques couacs virent toutefois troubler les derniers jours de préparation. Une émanation de gaz méthane, dont l'origine était inconnue (au dires du Directeur Général) força l'orchestre à ajuster les dernières touches du concert en plein air. Heureusement le climat du mois de juin se prêtait à l'exercice. Mais la légère brise perturba les partitions... La valeur acoustique ne put être démontrée... Les services de la Mairie déclenchèrent un plan d'assainissement du lieu. Quelques journalistes évoquèrent l'ancienne carrière située sous le terrain sur lequel avait été édifié l'auditorium. Le Maire affirma que toutes les mesures sanitaires, couplées à un strict respect de la règlementation, avaient été prises.
Bref, après ce fâcheux contretemps, le jour fatidique advint. Un cordon de police entoura l'auditorium, un service de voituriers facilita l'accès aux nombreux VIP, des hôtesses guidèrent les invités à leurs fauteuils. Le public, excité de vivre en direct ce rare moment, bourdonnait d'allégresse ! Les dernières minutes produirent un sacré tintamarre... Un groupe d'invités, plus guillerets que la moyenne des présents, lança un retentissant : " WE WANT SHOW ! " scandant cette demande en tapant des pieds sur le sol. Le bruit qu'il déclanchèrent fit des adeptes. Bientôt une bonne partie de la salle, par jeux, se prit à réclamer également le début de la manifestation ! L'auditorium tremblait sous cet impact que les architectes étaient loin d'avoir entrevu pour un tel établissement.
Pendant ce temps, la fosse d'orchestre se remplissait. Les instruments, les solistes, les partitions, les premiers ajustements, les derniers réglages. La routine du concert se déployait.
Le public se calma progressivement. Le Maire choisit cet instant pour venir sur scène et s'approcha du micro installé par un homme de l'ombre. Quelques secondes de silence précédèrent une salve d'applaudissements. Le discours du premier élu fut des plus sobres. Il ne put toutefois s'empêcher de narrer par le menu l'historique du projet qui voyait le jour après tant d'efforts. il fit un louable panégyrique de ses sponsors... Il se contint tout de même à ne pas dépasser les quinze minutes qu'il s'était fixée. Après des applaudissements plus mesurés, il quitta la scène et rendit discrètement visite aux musiciens. Il s'entretint longuement avec les solistes, vantant l'un, louant le second, flagornant le troisième... Créant sans le savoir la cacophonie à venir... Une fois les ego chauffés à blanc, le noir se fit. Ce noir sidéral, alors que quelques sons s'élevaient encore de la fosse d'orchestre, quelques réglages d'instruments...
C'en fut trop pour les excités du premier rang : ils reprirent de plus belle leur " WE WANT SHOW ! " Cette fois, l'intégralité du public se joignit aux perturbateurs. Les tremblements furent grandement amplifiés et on put mesurer la qualité acoustique, même sans micro !
Quelques imperceptibles émanations de gaz chatouillèrent les narines les plus raffinées. Peu y portèrent attention tant les regards et les ouies captaient toutes les centrations. La psychologie cybernétique passait par là en cet instant historique !
Un discret faisceau lumineux vint cueillir le Chef d'orchestre marchant vers ses ouailles. Celles-ci se levèrent derechef ! Les cris de la salles se métamorphosèrent en applaudissement soutenus, puis après qu'il eut salué son auditoire, le chef d'orchestre s'immobilisa. Un silence épais recouvrit tout l'auditorium et les premiers mouvements entraînèrent l'auditoire dans un voyage sans lendemain. L'introduction, assez lugubre empruntait Wagner, puis elle se déplaçait chez Berlioz, chacun révisait ses classiques. Le méthane, plus léger que l'air, s'élevait de concert !... Emportés par les vagues chromatiques, nombreux furent ceux qui , emportés par l'émotion romantique se dégageant de l'œuvre, inspirèrent à pleins poumons.
La psychologie cybernétique repassa par là et décentra les oreilles et les cœurs au profit de ce choc olfactif ! Chacun se tourna vers son voisin, l'interrogeant du regard...
Pendant ce temps dans la fosse, un premier violon s'avança pour donner plus de visibilité à son action. Le Chef d'orchestre, surpris par cet acte égocentrique condamna d'un regard appuyé cette mise en avant. Les clarinettes se tournèrent vers l'impétrant qui sous l'assaut recula. Tout sembla rentrer dans l'ordre jusqu'à ce que le second violon procède de même au grand désarroi de son premier collègue. Ce dernier, fort dignement, posa son instruments sur sa chaise et se dirigea dans les travées vers la loge du Maire. La Faust Symphonie continua néanmoins malgré les toux répétitives du premier rang. Tandis que les hautbois dispensaient leur nostalgie, quelques personnes, plus incommodées que les autres par les émanations, se levèrent et quittèrent la salle. Le Chef d'Orchestre, tout à son œuvre — bien qu'indisposé par ces vagues méthanières — contint son intoxication progressive, au nom de l'Art.
Dignement, malgré les odeurs insupportables, les musiciens remplirent leurs obligations, sans grande conviction. Pour ne pas s'étouffer, inutile d'assister à la fin de l'exécution cette superbe pièce musicale...
Le Maire, dans sa loge, protégé par cette alcôve, n'avait comme essentiel souci que de consoler le premier violon. Son transfert dans l'Orchestre, en plus d'être philharmonique, s'était révélé d'un coût pharaonique !
La salle se vida si rapidement que les passages plus doux du milieu de l'œuvre furent couverts par les piétinements du public cherchant la sortie. Quand les choristes rejoignirent la scène pour la fin de la symphonie, aucune des personnalités invitées n'assista à ce final réputé exceptionnel.
Les semaines suivantes, pour se consoler, le Maire lut et relut la foison d'articles de presse ayant vanté l'évènement à venir.
Le sponsor étranger de l'auditorium décida derechef qu'il fallait changer le Directeur Général, voire le Chef d'Orchestre. Le nom de trois nouveaux solistes fut fortement recommandé.
Bref, on allait voir ce qu'on allait voir et on allait entendre ce qu'on allait entendre !
FIN
Toulouse - OM Dimanche 11 mars 2018 21 heures Canal +
Une vie est constellée de milliards dinstants hétérogènes et de quelques instants qui forment lhomogénéité de lêtre pour un moment. Merci, Basile... :ball: Merci, Bernard... Merci, Robert... Merci, Didier...