14-11-2006, 00:43
Franchement, de vous à moi, quelques soient les émois de ce fameux mois, je n'arrive plus à être d'un pessimisme béat ...
Alors que, quelques saisons en arrière, je vociférais à qui mieux mieux contre les pieds carrés et les prés ronds de nos chers, très chers porte-maillots olympiens, voilà qu'aujourd'hui, je suis, non pas résigné, mais heureux d'un rien ... Un contrôle désorienté involontaire me plait, une passe aléatoire en biais me satisfait, un tir au gabian me comble ...
Je me revois encore, tout jeune et tout con, du saez dans les oreilles, mes trophées capsulaires de Valstar accrochés à mes chaussures dépouillés, mon maillot sur les épaules (ou sur l'épaule quand la sueur se mêlait à la fibre), haranguant les joueurs du haut de mon mètre 20 sur le téléviseur du troquet du coin, leur intimant l'ordre de jouer plus haut, plus vite, plus fort au risque de subir le courroux de ma colère. J'en aurais fait trembler plus d'un à cette époque, à moins que ce ne fussent des soubresauts de spasmes zigomatistiques ... En tout cas, je vivais, vibrais, tremblais, jurais, exigeant l'impossible, un jeu parfait, un entraineur charismatique et de talent, une ambiance de feu (métaphoriquement bien sûr).
Et là, comble de la maturité, ou de la macération, devenu un jeune adulte ou déjà un vieux con, je regarde peinard sur mon sofa le match de l'OM en admirant un jeu pauvre, des résultats médiocres, proche de l'encéphalogramme plat, je ne bouge même pas mon derrière lorsqu'un but nous est insidieusement marqué après un slalom dans une forêt de défenseurs enracinés. Même pas surpris, même pas déçu, je me contente de ce qu'il y a, l'exigence a disparu, laissant place à une passivité morose.
Pourtant, tout ça ne reste que du football, un ballon et des pieds, rien de comparable au Darfour ou à la Sierra Leone. Je relativise. C'est là le drame en fait, j'ai perdu le sens des rêves et la direction de l'imaginaire enfantin, Peter Pan s'est pendu dans le vestiaire de l'OM. Je les regarde tomber sur de l'herbe, en réclamant une prime de verdure, ou s'échanger des maillots sur fond d'hymne national la larme à l'oeil comme si leur vie en dépendait.
A quoi bon ce texte me direz-vous, et vous aurez bien raison, il n'a pas de leitmotiv de toute façon. Qu'ils ne se prennent pas la tête à fanfaronner après 2 victoires, qu'ils ne nous saoulent pas à pleurer après 2 défaites, qu'ils jouent, qu'ils fassent leur métier puisqu'on a professionnalisé le plaisir du jeu, que l'on ne les voit plus faire des pubs pour des pyjamas synthétiques ou des brosses à dents rotatives avant la fin de leurs carrières, qu'ils prouvent enfin sur le pré carré qu'ils ont des dispositions physiques et techniques qui excusent leurs émoluments disproportionnés.
En gros, j'en appelle à tous les esthètes du mollet rebondi, exigeons du beau jeu, de la technique, brûlons les journaux qui jouent avec nos émotions, promettant bons et vermeilles chaque semaine chez nos buralistes enfumés. Ne cliquons plus sur les sondages nauséabonds demandant au quidam internophile ce qu'il pense de la position assise d'Albert ou des hémorroïdes de Malouda. Revenons à l'essentiel, les matchs de district, où l'apprenti-boulanger va jouer le match de sa vie contre Crassac-sur-Bégoule en multipliant les arrêts et en se luxant le dos sur un pas de danse improvisé. Le football est populaire, ce n'est pas un vivier à pigeons, une cages à sardine où les médias dictent ce qu'on doit penser par le biais de pseudo-articles de pseudo-pigistes, le talent de la plume ne s'apprend pas sur msn.
On perd un peu chaque jour la magie du cuir, au profit (sacré profit) de futures introductions en bourse, le football d'antan, celui de mon enfance, de mes premiers hématomes, voire de mes premiers cartons ... Et pourtant, je vous assure, mon enfance n'est pas loin, rien que la fin du dernier siècle, mais il parait bien loin.
PS : Je squatte toujours chez les optimistes, vous pendez pas non plus