30-03-2006, 22:18
Il fut un temps où la rencontre de la fin de semaine était attendue avec impatience, elle alimentait les conversations, provoquait des discordes, nourrissait les disputes...
Dorénavant, les soirs de matchs, on échange nos ennuis de la semaine contre lEnnui.
Des rencontres qui, pour cause de retransmissions tardives, nous retiennent jusquà point dheure...
Cest inouï, la nuit lennui nuit dit le proverbe inuit ....à juste titre car par là-haut les nocturnes sont sacrément longues !
Mais quel est donc ce sentiment qui depuis quelques mois, sitôt lagitation mercatale passée nous engourdit dans une profonde léthargie ?
Nous sommes tous victimes de lhypocondrie, il y a certes diverses variétés dennuis qui tiennent aux circonstances de la vie et nont parfois quune existence passagère mais celle engendrée par notre équipe favorite semble nous plonger dans la plus profonde mélancolie.
La cause occasionnelle ne semble pas prête à disparaître, elle saccroche, elle étend ses tentacules comme une célèbre pieuvre et le marteau du juge ne semble pas suffisamment efficace pour lattendrir.
Alors on navigue dans la nostalgie, une autre façon de combattre la langueur, doublier la froide réalité, la cupide présence de vautours qui ne nous attirent que de maigres condors !
Alors on abandonne sa tenue olympienne, au placard les écharpes et les maillots floqués mais la langueur est comme une seconde peau ! Lennui naquit un jour de luniforme ôté.
Cest dans ce curieux état d'âme, cette condition humaine qui tient du bagne, auquel il n'y a peu d'issues que lon continue à supporter nos couleurs.
Cet état est le plus souvent le fruit dune solitude psychologique, là il est lexemple rare dun phénomène collectif .On va au stade en traînant les pieds, on se console parfois en trinquant à lavant match mais sans aucune excitation plus pour faire perdurer un rituel immuable que par profonde conviction.
Mais l'ennui, qui tant marqua nos enfances, est loin d'être simplement négatif. Ou alors, il l'est comme toujours le négatif est, condition indispensable d'autre chose. Louverture vers dautres horizons, vers dautres rencontres, vers dautres chemins que nos pas avaient inexplicablement délaissés.
Puisque lennui minforme du fait que ce sur quoi je porte mon attention ne répond à aucun intérêt ou besoin actuel, nest-il pas temps de reconsidérer la situation ?
Quelle est lalternative ?
Si lon possède le talent de Baudelaire on peut le décrire poétiquement:
« Il ferait volontiers de la terre un débris
Et dans un bâillement avalerait le monde
C'est l'ennui ! »
Sinon on se contente de fustiger les dirigeants malhonnêtes les entraîneurs incapables, les joueurs trop payés, les supporters trop bruyants pendant les minutes de silences et trop silencieux le reste du temps...
On noublie pas le rôle métaphorique et symbolique du décor extérieur. Lenceinte de Michelet architecturalement ratée dont la morne froideur de ses travées figure le paysage mental du supporter marseillais.
Faut-il obéir aux injonctions baudelairienne: « Levons lancre, ce pays nous ennuie »
Oui assurément ! Détachons-nous, place à la désinvolture, au diable la sensibilité, faisons la peau de lécorché vif ( là ça va pas être facile ) mort au spleen, vive le flegme !
Soyons sauvage. La barbarie plutôt que lennui!
« Laffection est un sentiment fade,cest lamour des gens tièdes » écrivait Paul Léautaud, alors brûlons dautres passions, faisons des transversales avec Alcantar, des oursins avec le Cap tain Oc, des anagrammes avec Pavarotti, soyons fous!
Au morose préférons les mots roses.
RLD et Courbis eux ne sennuient pas, leurs ennuis constituent un remède sûr contre lennui.
Ne nous laissons pas engloutir dans une vacuité pathologique, prenons exemple sur le docte forumiste qui est prêt à sacrifier son intime toison au prix de subtiles contorsions en cas de résultats positifs en Loire Atlantique. A cette évocation mon âme se réjouit.
Tiens, jai bien envie den pousser une..
Deux, trois...
C'est une vieill' maladie poisseuse,
Un sacré manqu' d'amour qui creuse.
Dans nos vill', dans nos campagnes,
Ça gagne.