22-10-2004, 01:05
Au nord c’était les corons, tristes rangées grises et délabrées, dans le bassin houiller où jadis officia le Gérard avec sa tête de N½ud-les-Mines. La terre c’était le charbon, veines de la terre désormais taries, où se sont versés sans cesse les sangs de ceux sans veine, ensevelis dans leurs vies vaines. Le ciel c’était l’horizon, comme une vision d’un avenir bouché par la masse déformée des gigantesques terrils. Les hommes des mineurs de fond, qui piochent encore aujourd’hui mais touchent le fond sans plus rien en tirer que le mode mineur.
Comme pour mieux coller à leur histoire, les Lensois avaient dernièrement appliqué à la lettre le concept de gueule noir. Mais les résultats plus que mitigés ont eu raison de cette politique peut-être désignée plus que volontaire. Alors les pingouins se sont fait décolorer en rappelant le cousin et le roi, tous deux munis de leur petit gilet en peau de canari, et en leur offrant une suite au Hilton le temps d’une nouvelle carrière. On en a fini avec la coke du siècle dernier, il y a eu trop de sang et le peuple demande enfin de l’or et des titres. La tête à Joël toujours en place puisque Gervais martèle qu’il n’y en aura pas de tranchées, les gens du nord attendent… attendent…
Mais la machine tourne un petit peu à vide depuis quelques temps, et le filon semble déjà épuisé. Bien que la cause avait parue entendue il y a encore peu de temps, un recrutement judicieux et un départ sinon en fanfare, du moins au son de l’accordéon, le bal musette est annulé et les dernières assiettes de moules frites refroidissent tristement au coin d’une table abandonnée. Comment les wagonnets auraient-ils bien pu quitter les rails et disparaître au fond de la fosse ? Le mécanisme est pourtant bien huilé, le matériel est flambant neuf et les matons ne peuvent déplorer le moindre tire-au-flanc… Finalement il n’y a rien de conséquent qui s’amoncelle, de la terre, de la terre et encore de la terre. Le bout de chaîne bat désespérément dans le vide, et l’état des tas n’en reste que plus désespérant.
Pendant ce temps là sur les bords de la méditerranée ceux sont d’autres qui s’impatientent. Ils n’ont pas dans les yeux le bleu du ciel qui inonde leur décor, et le soleil reste au-dehors, mais comme toujours, plutôt que de creuser la terre ils ont décidé de bâtir un château dans les airs. Le mistral est le ciment de leur joyau, celui-là même qui se doit de supporter plutôt que de porter ce nom pompeux dont il s’est retrouvé affublé dès l’aurore : « orgueil de la décennie ». Les plans sont sur la comète, et le maître à pied d’½uvre, à moins que le maitre-d’½uvre ne se retrouve à pieds. On vocifère, on gesticule, mais bien évidemment le projet prend du retard, d’erreurs de conception en imprévus plus qu’attendus. On aurait envie de dire qu’il y a presque tout pourtant…
Une base solide peut-être enfin constituée alors que se présente à nouveau le contremaître débauché de la capitale, tandis que les pièces bordelaises et sochaliennes ne demandent plus qu’à être rassemblées pour former le premier niveau de la grue. Au-dessus pourquoi pas un coup de pouce du jeune espoir local, Nasri, un ouvrier dont la charge est sûrement déjà trop lourde pour sa carrure encore frêle, et enfin les équilibristes, là-haut, dont on attend pourquoi pas quelques cabrioles au lieu de leurs habituelles pitreries… N’en déplaise à José, lampiste, éclaireur et guide en charge du bout du tunnel, de reprendre le mode d’emploi dans le bon sens et de relancer la construction avant qu’elle ne se transforme en champ de bataille…
Comme le chantait jadis feu Serge Reggiani, chacun d’ici ou d’ailleurs aura ces quelques mots en tête au moment de se lancer dans la reine… Il suffirait de presque rien… Presque rien, une étincelle pour un coup de grisou ou un feu de forêt, une étincelle pour le fond du trou ou pour atteindre les sommets.
Comme pour mieux coller à leur histoire, les Lensois avaient dernièrement appliqué à la lettre le concept de gueule noir. Mais les résultats plus que mitigés ont eu raison de cette politique peut-être désignée plus que volontaire. Alors les pingouins se sont fait décolorer en rappelant le cousin et le roi, tous deux munis de leur petit gilet en peau de canari, et en leur offrant une suite au Hilton le temps d’une nouvelle carrière. On en a fini avec la coke du siècle dernier, il y a eu trop de sang et le peuple demande enfin de l’or et des titres. La tête à Joël toujours en place puisque Gervais martèle qu’il n’y en aura pas de tranchées, les gens du nord attendent… attendent…
Mais la machine tourne un petit peu à vide depuis quelques temps, et le filon semble déjà épuisé. Bien que la cause avait parue entendue il y a encore peu de temps, un recrutement judicieux et un départ sinon en fanfare, du moins au son de l’accordéon, le bal musette est annulé et les dernières assiettes de moules frites refroidissent tristement au coin d’une table abandonnée. Comment les wagonnets auraient-ils bien pu quitter les rails et disparaître au fond de la fosse ? Le mécanisme est pourtant bien huilé, le matériel est flambant neuf et les matons ne peuvent déplorer le moindre tire-au-flanc… Finalement il n’y a rien de conséquent qui s’amoncelle, de la terre, de la terre et encore de la terre. Le bout de chaîne bat désespérément dans le vide, et l’état des tas n’en reste que plus désespérant.
Pendant ce temps là sur les bords de la méditerranée ceux sont d’autres qui s’impatientent. Ils n’ont pas dans les yeux le bleu du ciel qui inonde leur décor, et le soleil reste au-dehors, mais comme toujours, plutôt que de creuser la terre ils ont décidé de bâtir un château dans les airs. Le mistral est le ciment de leur joyau, celui-là même qui se doit de supporter plutôt que de porter ce nom pompeux dont il s’est retrouvé affublé dès l’aurore : « orgueil de la décennie ». Les plans sont sur la comète, et le maître à pied d’½uvre, à moins que le maitre-d’½uvre ne se retrouve à pieds. On vocifère, on gesticule, mais bien évidemment le projet prend du retard, d’erreurs de conception en imprévus plus qu’attendus. On aurait envie de dire qu’il y a presque tout pourtant…
Une base solide peut-être enfin constituée alors que se présente à nouveau le contremaître débauché de la capitale, tandis que les pièces bordelaises et sochaliennes ne demandent plus qu’à être rassemblées pour former le premier niveau de la grue. Au-dessus pourquoi pas un coup de pouce du jeune espoir local, Nasri, un ouvrier dont la charge est sûrement déjà trop lourde pour sa carrure encore frêle, et enfin les équilibristes, là-haut, dont on attend pourquoi pas quelques cabrioles au lieu de leurs habituelles pitreries… N’en déplaise à José, lampiste, éclaireur et guide en charge du bout du tunnel, de reprendre le mode d’emploi dans le bon sens et de relancer la construction avant qu’elle ne se transforme en champ de bataille…
Comme le chantait jadis feu Serge Reggiani, chacun d’ici ou d’ailleurs aura ces quelques mots en tête au moment de se lancer dans la reine… Il suffirait de presque rien… Presque rien, une étincelle pour un coup de grisou ou un feu de forêt, une étincelle pour le fond du trou ou pour atteindre les sommets.
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