06-06-2004, 19:46
La Grande Histoire de la Transhumance 2003-04, vol.2
Pour Perrin et la caution Marseillaise, la chèvre est le combat de toute une vie...
Le berger Perrin était particulièrement occupé en cet été 2003, entre ventes à la sauvette et séparations douleureuses d'une part, tournées des marchés à bestiaux européens de l'autre. Il avait dans l'optique de monter un troupeau avec des races polyvalentes pouvant adopter le standard mondial de 4 repas par jour, 4 soins vétérinaires par mois et 2 saillies par an. C'était sans compter sur l'hostile milieu marseillais. Nombre de ces nouveaux arrivants ont perdu le rendement avec leur herbe d'origine, tant et si bien que notre pâtre s'est vu signifier la porte de sortie après une longue période durant laquelle ses vaches étaient devenues bien maigres. Un paysan local, connaissant comme sa poche le terrain, est appelé à la rescousse, pour sortir le loup qui faisait beaucoup de dégâts dans la bergerie. Retour en deux temps sur cette mouvementée transhumance marseillaise.
La tâche d'Alain Perrin en terme de cession de chèvres et autres spécimens était, on l'a assez répété, extrêmement ardue. Lors de l'épisode précédent, nous avons compris l'ampleur de son travail d'assainissement du troupeau. Il lui restait à régler quelques détails:
La Nature est parfois étrange. Tombé de son nid lors de son apprentisage au vol, un jeune Aiglon avait été recueilli et élevé amoureusement dans cette extraordinaire arche de Noé olympienne. Las, Damien Gregorini, malgré des ailes d'une taille hors du commun, n'a jamais eu la confiance du maître des lieux pour garder avec ses griffes acérées les cages de son club adoptif. C'est tout heureux qu'on lui donna l'occasion de retrouver ses origines, au cours de la saison précédente. Les liens de sang, le sens de la famille, la joie de se retrouver après ses longues années ont fait le reste: le jeune Damien s'est épanoui au contact de ses parents naturels, se bonifiant sous leur regard attendri. Tant et si bien qu'ils ont demandé aux tuteurs du jeune Damien de vouloir leur accorder sa garde définitive. Dans un élan de générosité et moyennant quelques euros niçois tout de même, Alain Perrin a laissé notre Aiglon voler de ses propres ailes, lui redonnant une liberté qu'il n'aurait jamais dû perdre...
Il a été suivi par son frère de sang, à la destinée frappante de similitude. Jeune marseillais, Pancho Abardonado ne rêvait que d'intégrer bergerie olympienne, de brouter l'herbe mythique du Vélodrome. Au terme de douleureux sacrifices, il parvint enfin à fouler cette pelouse chère à son coeur. Mais celle-ci est souvent amère pour les locaux, qui pensent tant à la goûter qu'elle peut leur faire énormément de mal... Trop fougueux, le chien fou des quartiers nords? Toujours est-il que son élevage voulait s'en séparer à tout prix. On l'a jeté dans le car amenant son pote Damien à Nice, les deux anciens espoirs étaient devenus indésirables. Il a fait une superbe saison au stade du Ray et logiquement l'OGC a demandé à Marseille de bien vouloir lui céder le chef de meute qu'elle avait déja accueilli une saison durant.
Les 2 anciens espoirs marseillais sont dorénavant réunis sous le maillot rouge et noir des Niçois...
Berger caractériel avec ses ouailles? Pression des consommateurs sur la mauvaise qualité du produit? Plainte du Bouchet sur les délais de livraison de ses commandes? Erreurs de castings lors du renouvellement du cheptel? Quelle(s) qu'en soi(en)t les raisons, le Perrin paie les pots de porcelenaine cassés et est donc limogé. Il est remplacé par la caution Marseillaise, le chantre de la Provence, le roi du retour au terroir et aux valeurs traditionnelles. Il a mis un grand coup de pied dans la fourmilière, en réorganisant l'étable sur de nouvelles valeurs, en mettant au goût du jour les races locales ou besogneuses... Il a lui aussi fait sa petite transhumance lors de l'hiver, comme tout bon nouveau pâtre voulant apposer sa griffe.
Première cible, le grand Fernandao. Sa haute stature, sa longue chevelure et sa bosse si caractéristique le rendaient pourtant attachant. Mais son rendement n'était pas au diapason de ses performances lors de la campagne précédente. Tout ceci a décidé le José à le prêter à un élevage plus familial, en grosses difficultés en cet hiver. Grâce à la confiance de ses congénères, Lucio da Costa s'est retrouvé dans la ville Rose, la capitale de l'Occitanie, la belle Toulouse. Il a grandement participé au sauvetage du TFC, plus en s'impliquant dans la vie des Pitchouns au point d'embrasser fougueusement l'emblème du club en guise de célébration que par son apport comptable (3 buts dont sur pénalty face à l'OM justement). Son avenir semble s'insrire dans le nouveau club qui monte...
Le vainqueur du Concours Général Inter-Olympien 02-03 était sans contestation possible le belge Daniel Van Buyten. Dans tous les bons coups l'an passé, sous la houlette de son mentor bovin, il avait tout explosé, que ce soient les attaquants ou les filets adverses. Mais, seul face à de nouvelles responsabilités, Dany n'a pu su (ou voulu) supporter la cloche de la chèvre leader, chargée de mener les autres au meilleur pâturage. Lui, son but, c'était de goûter aux vertes pelouses de Manchester. Son souhait, refusé par Perrin, est exaucé par la caution Marseillaise, qui le prête à City. L'herbe est moins verte que chez son glorieux voisin, mais Van Buyten s'en contente fort bien. Il impressionne son coach et les observateurs, avant de se blesser gravement à la patte en mars, terminant là sa saison. Il a clamé haut et fort son ras-le-bol de la ferme olympienne, on ne devrait certainement plus le revoir arborer le maillot marseillais l'an prochain...
Pour terminer, honneur au Tsar... Dmitry Sychev était annoncé comme une bête de foire, un as hors compétition, un joyau futur lauréat de tous les concours agricoles. Quelques coups d'éclat par-ci, par-là, mais le russe tardait à se remplumer pour lutter plus efficacement contre les sbires adverses et donc n'arrivait pas à confirmer son statut. Lucide ou impatient, la caution Marseillaise a décidé de le renvoyer par monts et par v(e)aux, direction sa Russie natale. Comme par miracle, l'air frais de sa jeunesse lui a redonné vie, tant en club (au Lokomotiv Moscou) qu'en sélection. Le vilain petit canard s'est-il transformé en cygne? La réponse est délicate, tant les cheptels sont différents entre les deux terroirs...
Ces trois derniers exemples montrent bien que la transhumance d'une année n'a aucune cohérence avec celle de l'année précédente. Des pièces maîtresses comme les deux premiers, ou des espoirs adulés comme le russe, peuvent avec le temps devenir indésirables ou improductifs, et partir sous d'autres cieux.
Peut-être à méditer à l'heure des premières transactions, des premiers espoirs, des premières désillusions...
Les stars de la Ferme sont souvent éphémères...