03-02-2004, 21:59
Cinq heures…
J’avais débarqué dans ce petit port depuis deux jours. A notre arrivée, je m’étais permis d’observer longuement tous ces gens qui s’activaient : du docker bronzé jusqu’à l’os à la femme drapée telle une archi-duchesse, en passant par quelques gamins qui, çà et là, s’amusaient au gré de l’emplacement des pontons. La mer était très calme. Mon c½ur, lui, battait la chamade…
Je n’étais là que depuis deux jours. L’avant-veille, mes pieds foulaient à peine la terre ferme que mes yeux et mon c½ur avaient été foudroyés. Comme jamais. Le loup solitaire que j’étais ne voulait pas reconnaître l’évidence. Je me sentais dans la peau d’un autre, accoudé à la rambarde de cet imposant navire que je ne quittais plus depuis des lustres. Comble de l’histoire, le « Pacific Cruiser » n’aurait jamais dû faire escale dans ce port exigu, perdu au nord d’une île des Caraïbes dans laquelle l’hivernage avait laissé sa marque inaliénable.
Elle était rentrée dans ma vie sans se soucier du surlendemain. Je comptais poser ma malle pour quelques quarante huit heures mais, ce ne fut pas totalement le cas. J’étais en train de perdre la barre. Elle me l’avait fait perdre, à moi, le matelot si expérimenté. Pas un seul océan que je n’eusse parcouru, pas un seul danger que point je ne connusse. Il fallait pourtant me résoudre à abandonner ma fierté de marin. Grâce à sa frimousse, je venais de redécouvrir la candeur du jeune mousse.
Quelques boucles blondes contrastaient avec sa chevelure châtain. L’oeuvre assidue du soleil ? Une proie facile au premier abord, l’une de ces filles au coeur tendre et pur qui tentaient, tout au long de l’année, de garder une protection masculine auprès d’elles. Elle avait longtemps frappé à la porte de coeurs fermés. Comme le mien. Rideau de fer. L’histoire était ordinaire. Dans ma tête, dès le premier soir, j’aurais réussi mon coup. Mais ce ne fut pas le cas, inhibé que je me sentis durant le lapse de temps écoulé à ses côtés. Cruelle sensation, oubliée depuis l’adolescence...
La nuit blanche passée par la suite n’avait servi strictement à rien. Sinon à comprendre l’ampleur des dégâts causés par le cyclone qui s’était abattu en moi. Un cyclone nommé Debby. Frappé de plein fouet, je m’appliquai à retrouver une once de sérénité. Je m’étais surtout convaincu de pratiquer comme « à l’accoutumée » sans m'éprendre ni me méprendre. J’avais réussi la nuit dernière. Mais avec une tout autre délectation que dans les situations préalables. En réfléchissant bien, je n’avais en fait rien réussi. J’y avais même laissé bien des écailles. Elle le ressentait différemment mais, pour moi, tout devait rester éphémère. Inquiété par cet espoir naissant, je décidai d’abandonner...
Nous devions déjà repartir. Le sourire de Debby en moi également. Les gamins avaient fini de gambader et les gens ne déambulaient plus. Un bruit long et strident se fit entendre. Elle habitait assez loin pour ne pas être éveillée. Toute cette étendue d’eau serait mon remède. Elle guérirait forcément mon mal intérieur et les ravages de la tempête Debby. Après cela, j’étais désormais prêt à tout affronter.
Je lui avais donné un dernier rendez-vous à cinq heures sur le pont supérieur du Pacific Cruiser. Elle tenait à le visiter en ma compagnie. L’ancre était déjà levée et lorsqu’elle arriverait dans trois heures, le Pacific Cruiser ne serait plus qu’un lointain souvenir. Moi dedans. Moi avec. Sans m’en apercevoir, j’avais tourné le dos au port, le c½ur serré. Dans ma tête, les mêmes mots : « cinq heures… »
Mathildien75
A Moom...(il se reconnaitra ! ;) )
J’avais débarqué dans ce petit port depuis deux jours. A notre arrivée, je m’étais permis d’observer longuement tous ces gens qui s’activaient : du docker bronzé jusqu’à l’os à la femme drapée telle une archi-duchesse, en passant par quelques gamins qui, çà et là, s’amusaient au gré de l’emplacement des pontons. La mer était très calme. Mon c½ur, lui, battait la chamade…
Je n’étais là que depuis deux jours. L’avant-veille, mes pieds foulaient à peine la terre ferme que mes yeux et mon c½ur avaient été foudroyés. Comme jamais. Le loup solitaire que j’étais ne voulait pas reconnaître l’évidence. Je me sentais dans la peau d’un autre, accoudé à la rambarde de cet imposant navire que je ne quittais plus depuis des lustres. Comble de l’histoire, le « Pacific Cruiser » n’aurait jamais dû faire escale dans ce port exigu, perdu au nord d’une île des Caraïbes dans laquelle l’hivernage avait laissé sa marque inaliénable.
Elle était rentrée dans ma vie sans se soucier du surlendemain. Je comptais poser ma malle pour quelques quarante huit heures mais, ce ne fut pas totalement le cas. J’étais en train de perdre la barre. Elle me l’avait fait perdre, à moi, le matelot si expérimenté. Pas un seul océan que je n’eusse parcouru, pas un seul danger que point je ne connusse. Il fallait pourtant me résoudre à abandonner ma fierté de marin. Grâce à sa frimousse, je venais de redécouvrir la candeur du jeune mousse.
Quelques boucles blondes contrastaient avec sa chevelure châtain. L’oeuvre assidue du soleil ? Une proie facile au premier abord, l’une de ces filles au coeur tendre et pur qui tentaient, tout au long de l’année, de garder une protection masculine auprès d’elles. Elle avait longtemps frappé à la porte de coeurs fermés. Comme le mien. Rideau de fer. L’histoire était ordinaire. Dans ma tête, dès le premier soir, j’aurais réussi mon coup. Mais ce ne fut pas le cas, inhibé que je me sentis durant le lapse de temps écoulé à ses côtés. Cruelle sensation, oubliée depuis l’adolescence...
La nuit blanche passée par la suite n’avait servi strictement à rien. Sinon à comprendre l’ampleur des dégâts causés par le cyclone qui s’était abattu en moi. Un cyclone nommé Debby. Frappé de plein fouet, je m’appliquai à retrouver une once de sérénité. Je m’étais surtout convaincu de pratiquer comme « à l’accoutumée » sans m'éprendre ni me méprendre. J’avais réussi la nuit dernière. Mais avec une tout autre délectation que dans les situations préalables. En réfléchissant bien, je n’avais en fait rien réussi. J’y avais même laissé bien des écailles. Elle le ressentait différemment mais, pour moi, tout devait rester éphémère. Inquiété par cet espoir naissant, je décidai d’abandonner...
Nous devions déjà repartir. Le sourire de Debby en moi également. Les gamins avaient fini de gambader et les gens ne déambulaient plus. Un bruit long et strident se fit entendre. Elle habitait assez loin pour ne pas être éveillée. Toute cette étendue d’eau serait mon remède. Elle guérirait forcément mon mal intérieur et les ravages de la tempête Debby. Après cela, j’étais désormais prêt à tout affronter.
Je lui avais donné un dernier rendez-vous à cinq heures sur le pont supérieur du Pacific Cruiser. Elle tenait à le visiter en ma compagnie. L’ancre était déjà levée et lorsqu’elle arriverait dans trois heures, le Pacific Cruiser ne serait plus qu’un lointain souvenir. Moi dedans. Moi avec. Sans m’en apercevoir, j’avais tourné le dos au port, le c½ur serré. Dans ma tête, les mêmes mots : « cinq heures… »
Mathildien75
A Moom...(il se reconnaitra ! ;) )
"Chevalier, tu as dit que tu crois en un monde où les frères nés sous une mauvaise étoile peuvent vivre ensemble et que tu te battrais pour le construire. Aujourd'hui, sache que moi aussi je partage ton rêve." Bud d'Alcor