31-12-2003, 08:09
Europe Le G 14 ou le foot plaqué or
Le G 14 qui regroupe les dix-huit plus grands clubs européens a installé une représentation à Bruxelles.
Bruxelles (Belgique),
envoyé spécial.
L'adresse (avenue de la Toison-d'Or) sonne bien. Le quartier est cossu. Le lieu central. C'est dans ce triangle doré, à deux pas de l'avenue Louise, au milieu des Versace, Louis Vuitton et autres Cartier que la vitrine stratégique du cercle très privé des clubs de football les plus puissants d'Europe, le G 14, a ouvert officiellement le 5 novembre dernier à Bruxelles. Locaux clairs et aérés (400 m2 pour cinq personnes) mobilier moderne, baies vitrées, cette association structurée en groupement européen d'intérêt économique depuis novembre 2000 défend comme son nom ne l'indique pas les intérêts de dix-huit clubs européens (1) auprès " des institutions qui réglementent le football en général et le football de club en particulier ". Pourquoi Bruxelles plutôt que Zurich où siège l'UEFA ? Simple choix stratégique pour ce groupe de pression puisque la Commission européenne s'applique à faire respecter le droit communautaire dans les affaires du ballon rond.
Pour entrer dans le cénacle, montrer patte blanche ne suffit pas. Il faut y être invité. Les quatre derniers clubs à avoir été cooptés (Arsenal, Bayer Leverkusen, Olympique lyonnais et Valencia FC) font d'ailleurs partie des pays membres de ce cercle très restreint. On ne se mélange pas. Si le palmarès sportif suffisait au début (au moins un titre européen), il faut aujourd'hui afficher une gestion exemplaire. C'est le cas de Lyon, unique membre à ne pas avoir remporté une Coupe européenne mais dont le budget de 101,5 millions d'euros (+ 8 % par rapport à 2001), le plus important de la Ligue 1, et le chiffre d'affaires (94 millions), en hausse de 15 %, ont rapidement fait oublier cet impair. " Notre porte n'est pas ouverte, mais elle n'est pas verrouillée non plus, précise Thomas Kurth. Si dans le futur des clubs écossais, turcs, voire grecs allient performances sportives et gestion sérieuse, tout est possible. Notre ambition est l'excellence. Être les premiers et se donner les moyens de le rester. "
Et le meilleur moyen de le rester, c'est bien entendu de " préserver l'équilibre de leurs finances opérationnelles " dans un contexte économique défavorable et de veiller à la politique de définition et de commercialisation des droits de retransmission des compétitions interclubs au niveau européen. Les clubs se sont par ailleurs engagés à respecter toute une batterie de mesures économiques dont les plus drastiques sont l'engagement à ne pas consacrer à partir de 2005 plus de 70 % de leur budget de fonctionnement à la masse salariale et l'éventuelle revue à la baisse des salaires des joueurs en cas de manque de performance. " Le monde a évolué, et le football qui fait partie de la société ne peut rester à l'écart, note Thomas Kurth. Le problème, c'est que les clubs ont signé des contrats à long terme en tablant sur une augmentation des recettes et qu'ils ont aujourd'hui du mal à honorer leur contrat dans une économie à la baisse. À cela, il faut ajouter des budgets qui peuvent varier de 30 % certaines années du fait des participations incertaines aux compétitions. Il faut donc faire des ajustements. "
Dans ce contexte difficile, les clubs sont d'autant plus sensibles à l'argent frais. C'est ce qu'a bien compris l'homme d'affaire espagnol Carlos Garcia Pardo en adressant fin décembre un projet confidentiel de Ligue privée, European Golden Cup, à 26 équipes européennes. Avec un million d'euros par point gagné, jusqu'à 110 millions pour le vainqueur, le dernier empochant 30 millions d'euros (le Real Madrid vainqueur de la Ligue des champions 2002 n'a empoché que 40 millions d'euros - NDLR) et une augmentation du tarif de 8 % par an, certains clubs plus pauvres, comme ceux de l'Hexagone, pourraient être tentés de céder à ces sirènes financières. " Les lois européennes permettent-elles une telle compétition ? s'interroge Thomas Kurth, peu favorable à ce projet. Sortir de l'UEFA serait très délicat. "
C'est que le G 14, sorte de contre-pouvoir de l'UEFA, s'il a toujours nié vouloir entreprendre une scission avec l'instance dirigeante du football européen, tire sa force de son bras de fer permanent avec cette dernière. " Les clubs font le spectacle et l'UEFA croit mieux savoir qu'eux ce dont ils ont besoin. Le G 14 conteste cette hégémonie et se veut le précurseur dans l'émergence d'une ligue professionnelle européenne qui gérerait les compétitions du Vieux Continent à la place de l'UEFA d'ici quatre ou cinq ans, souligne Kurth. Il s'agirait d'une délégation que nous donnerait l'UEFA comme celle que la FFF (Fédération française de football) accorde à la LFP (Ligue de football professionnel). Les projets de ligues privées qui fleurissent par-ci par-là devraient contribuer à leur ouverture d'esprit. De toute façon, ceux qui refusent le changement finissent toujours par se faire liquider. "
En attendant de faire la pluie et le beau temps, le G 14 n'a pas apprécié la décision subite de l'UEFA en juillet dernier de supprimer la deuxième phase qualificative pour l'édition 2003 de la Ligue des champions en raison de la baisse d'audience de 10 %. " Cela représente six matchs en moins et un gros manque à gagner pour les clubs. Cette décision sans aucune consultation témoigne d'un manque de respect. " C'est pour cela que le G 14 souhaite obtenir depuis longtemps un siège au comité exécutif de l'UEFA, " pour voir ce qu'il s'y passe ".
Le nez dans ces affaires, le G 14 n'a pas l'impression de se couper des autres clubs. " Nous ne nous coupons pas de la base. Le G 14 se distingue par ses succès sportifs et sa dimension économique. Notre intérêt est d'aborder des problèmes qui nous sont communs. Ces dix-huit clubs ont des liens avec les petits clubs de leurs championnats respectifs qui restent de toute façon leur activité primaire. "
Nicolas Guillermin
(1) AC Milan, AFC Ajax, Borussia Dortmund, FC Barcelone, FC Barcelone, FC Bayern Munich, FC Internazionale Milano, FC Porto, Juventus FC, Liverpool FC, Manchester United FC, Olympique de Marseille, Paris Saint-Germain, PSV Eindhoven, Real Madrid, Arsenal FC, Bayer Leverkusen, Olympique Lyonnais, Valencia FC.
et encore
http://www.liberation.com/page.php?Article=158664
http://www.humanite.presse.fr/journal/20...-08-382140
http://www.lyonpeople.com/news/p3g14_foot.html
Le G 14 qui regroupe les dix-huit plus grands clubs européens a installé une représentation à Bruxelles.
Bruxelles (Belgique),
envoyé spécial.
L'adresse (avenue de la Toison-d'Or) sonne bien. Le quartier est cossu. Le lieu central. C'est dans ce triangle doré, à deux pas de l'avenue Louise, au milieu des Versace, Louis Vuitton et autres Cartier que la vitrine stratégique du cercle très privé des clubs de football les plus puissants d'Europe, le G 14, a ouvert officiellement le 5 novembre dernier à Bruxelles. Locaux clairs et aérés (400 m2 pour cinq personnes) mobilier moderne, baies vitrées, cette association structurée en groupement européen d'intérêt économique depuis novembre 2000 défend comme son nom ne l'indique pas les intérêts de dix-huit clubs européens (1) auprès " des institutions qui réglementent le football en général et le football de club en particulier ". Pourquoi Bruxelles plutôt que Zurich où siège l'UEFA ? Simple choix stratégique pour ce groupe de pression puisque la Commission européenne s'applique à faire respecter le droit communautaire dans les affaires du ballon rond.
Pour entrer dans le cénacle, montrer patte blanche ne suffit pas. Il faut y être invité. Les quatre derniers clubs à avoir été cooptés (Arsenal, Bayer Leverkusen, Olympique lyonnais et Valencia FC) font d'ailleurs partie des pays membres de ce cercle très restreint. On ne se mélange pas. Si le palmarès sportif suffisait au début (au moins un titre européen), il faut aujourd'hui afficher une gestion exemplaire. C'est le cas de Lyon, unique membre à ne pas avoir remporté une Coupe européenne mais dont le budget de 101,5 millions d'euros (+ 8 % par rapport à 2001), le plus important de la Ligue 1, et le chiffre d'affaires (94 millions), en hausse de 15 %, ont rapidement fait oublier cet impair. " Notre porte n'est pas ouverte, mais elle n'est pas verrouillée non plus, précise Thomas Kurth. Si dans le futur des clubs écossais, turcs, voire grecs allient performances sportives et gestion sérieuse, tout est possible. Notre ambition est l'excellence. Être les premiers et se donner les moyens de le rester. "
Et le meilleur moyen de le rester, c'est bien entendu de " préserver l'équilibre de leurs finances opérationnelles " dans un contexte économique défavorable et de veiller à la politique de définition et de commercialisation des droits de retransmission des compétitions interclubs au niveau européen. Les clubs se sont par ailleurs engagés à respecter toute une batterie de mesures économiques dont les plus drastiques sont l'engagement à ne pas consacrer à partir de 2005 plus de 70 % de leur budget de fonctionnement à la masse salariale et l'éventuelle revue à la baisse des salaires des joueurs en cas de manque de performance. " Le monde a évolué, et le football qui fait partie de la société ne peut rester à l'écart, note Thomas Kurth. Le problème, c'est que les clubs ont signé des contrats à long terme en tablant sur une augmentation des recettes et qu'ils ont aujourd'hui du mal à honorer leur contrat dans une économie à la baisse. À cela, il faut ajouter des budgets qui peuvent varier de 30 % certaines années du fait des participations incertaines aux compétitions. Il faut donc faire des ajustements. "
Dans ce contexte difficile, les clubs sont d'autant plus sensibles à l'argent frais. C'est ce qu'a bien compris l'homme d'affaire espagnol Carlos Garcia Pardo en adressant fin décembre un projet confidentiel de Ligue privée, European Golden Cup, à 26 équipes européennes. Avec un million d'euros par point gagné, jusqu'à 110 millions pour le vainqueur, le dernier empochant 30 millions d'euros (le Real Madrid vainqueur de la Ligue des champions 2002 n'a empoché que 40 millions d'euros - NDLR) et une augmentation du tarif de 8 % par an, certains clubs plus pauvres, comme ceux de l'Hexagone, pourraient être tentés de céder à ces sirènes financières. " Les lois européennes permettent-elles une telle compétition ? s'interroge Thomas Kurth, peu favorable à ce projet. Sortir de l'UEFA serait très délicat. "
C'est que le G 14, sorte de contre-pouvoir de l'UEFA, s'il a toujours nié vouloir entreprendre une scission avec l'instance dirigeante du football européen, tire sa force de son bras de fer permanent avec cette dernière. " Les clubs font le spectacle et l'UEFA croit mieux savoir qu'eux ce dont ils ont besoin. Le G 14 conteste cette hégémonie et se veut le précurseur dans l'émergence d'une ligue professionnelle européenne qui gérerait les compétitions du Vieux Continent à la place de l'UEFA d'ici quatre ou cinq ans, souligne Kurth. Il s'agirait d'une délégation que nous donnerait l'UEFA comme celle que la FFF (Fédération française de football) accorde à la LFP (Ligue de football professionnel). Les projets de ligues privées qui fleurissent par-ci par-là devraient contribuer à leur ouverture d'esprit. De toute façon, ceux qui refusent le changement finissent toujours par se faire liquider. "
En attendant de faire la pluie et le beau temps, le G 14 n'a pas apprécié la décision subite de l'UEFA en juillet dernier de supprimer la deuxième phase qualificative pour l'édition 2003 de la Ligue des champions en raison de la baisse d'audience de 10 %. " Cela représente six matchs en moins et un gros manque à gagner pour les clubs. Cette décision sans aucune consultation témoigne d'un manque de respect. " C'est pour cela que le G 14 souhaite obtenir depuis longtemps un siège au comité exécutif de l'UEFA, " pour voir ce qu'il s'y passe ".
Le nez dans ces affaires, le G 14 n'a pas l'impression de se couper des autres clubs. " Nous ne nous coupons pas de la base. Le G 14 se distingue par ses succès sportifs et sa dimension économique. Notre intérêt est d'aborder des problèmes qui nous sont communs. Ces dix-huit clubs ont des liens avec les petits clubs de leurs championnats respectifs qui restent de toute façon leur activité primaire. "
Nicolas Guillermin
(1) AC Milan, AFC Ajax, Borussia Dortmund, FC Barcelone, FC Barcelone, FC Bayern Munich, FC Internazionale Milano, FC Porto, Juventus FC, Liverpool FC, Manchester United FC, Olympique de Marseille, Paris Saint-Germain, PSV Eindhoven, Real Madrid, Arsenal FC, Bayer Leverkusen, Olympique Lyonnais, Valencia FC.
et encore
http://www.liberation.com/page.php?Article=158664
http://www.humanite.presse.fr/journal/20...-08-382140
http://www.lyonpeople.com/news/p3g14_foot.html