26-12-2005, 03:14
Espigoulien a écrit :Voilà ce que petit papa Dreyfus aurait pu nous offrir pour Noël s'il n'était pas une ordure:(
http://www.footmercato.net/figueroa-veut...e3886.html
Pendant longtemps, les Parisiens ont jeté leurs déchets sur la voie publique ou dans les fossés. C'est grâce à ces déchets, qui se sont fossilisés, que l'on peut reconstituer les modes de consommation des Parisiens depuis deux mille ans. Merci les déchets, témoins du passé !
Prenons quelques instants pour tourner les pages de l'histoire de Paris, la fameuse «Ville Lumière». Ce retour en arrière nous montre que la Capitale n'a pas toujours été aussi belle qu'on veut bien nous le faire croire.
En voici quelques exemples :
- En 1184, Philippe Auguste souhaite lutter contre la marée montante des ordures dans Paris en commandant le pavage des rues de la cité. Quatre cents ans plus tard, seulement la moitié des rues est pavée.
- Louis XII décide en 1506 que la royauté se chargera du ramassage des ordures et de leur évacuation. À la taxe prévue pour ce service s'ajoute celle destinée à financer l'éclairage axial des rues. La taxe prend le nom de «taxe des boues et des lanternes». L'hostilité générale enterra cette ordonnance pour longtemps.
- En 1750, Rousseau quitte la Capitale en la saluant par un «Adieu, ville de boue !». Il est vrai que Paris était connu depuis longtemps sous ce vocable puisque Lutèce vient du latin lutum qui signifie boue.
- En 1799, une ordonnance de police impose aux propriétaires et locataires parisiens de balayer chaque jour devant leur logis.
- En mars 1883 est créée une taxe spécifique «balayage». Au même moment, les découvertes de Pasteur se révèlent décisives dans l'histoire de l'hygiène. C'est aussi la période des grands travaux, entrepris par Haussmann, qui transforment le paysage urbain parisien.
Le 24 novembre 1883, Eugène Poubelle, préfet de la Seine, signe le fameux arrêté qui oblige les propriétaires parisiens à fournir à chacun de leurs locataires un récipient muni d'un couvercle. Ainsi naissent les poubelles (voir plus bas l'histoire de l'arrêté Poubelle).
Le préfet Poubelle avait tout prévu : dimension et contenance des boîtes. Il avait même imaginé la collecte sélective. Trois boîtes étaient obligatoires : une pour les matières putrescibles, une pour les papiers et les chiffons, et une dernière pour le verre, la faïence ou les coquilles d'huîtres ! Ce nouveau règlement ne fut que partiellement respecté. Concernant le tri, plus d'un siècle après, on le redécouvre...
Il aura fallu attendre près d'un siècle entre l'invention de la poubelle et la mise en place d'une véritable collecte et de lieux de stockage des déchets. En 1975, la loi confie aux collectivités locales la responsabilité d'organiser la collecte des déchets ainsi que leur traitement ou leur stockage dans un lieu agréé.
Devant le développement des décharges et les problèmes de pollution (des sols surtout), la loi est modifiée en juillet 1992 : les collectivités locales doivent s'organiser pour supprimer les dépôts sauvages et valoriser les déchets par le recyclage, le compostage ou l'incinération propre (ce qui reste à démontrer !).
Au même moment, dans de nombreuses communes françaises, la société Eco-Emballages (agréée par les pouvoirs publics) lance un programme de récupération et de valorisation des déchets d'emballages ménagers. Les déchets deviennent source de matière première et d'énergie, ils sont valorisés. À Paris, il faudra attendre novembre 1997 pour qu'une expérience de collecte sélective en porte à porte soit proposée dans un secteur du 13ème arrondissement. La généralisation de cette collecte sélective a débuté en juin 2000 dans 5 arrondissements. La nouvelle équipe municipale conduite par Bertrand Delanoë poursuit l'extension de la collecte sélective. Depuis fin 2002, la collecte sélective est installée dans tous les arrondissements (consulter notre page sur la collecte sélective à Paris).
Hier, les chiffonniers «faisaient» nos poubelles ; aujourd'hui, c'est une véritable industrie, créatrice d'emplois, qui s'en occupe.
Bibliographie :
Catherine de Silguy, Histoire des hommes et de leurs ordures (Le Cherche Midi, 1996).
Katia Weidenfeld, La police de la petite voirie à Paris à la fin du Moyen Age (L.G.D.J. Histoire du droit, 1996).
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Le Préfet Poubelle n'est pas que le "père" des poubelles ! Bientôt d'autres informations !...
La poubelle a 120 ans ! Les arrêtés de Monsieur Eugène Poubelle, Préfet de la Seine.
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22 février 1884 : les élus suppriment la collecte sélective des coquilles d'huîtres... mais autorisent le chiffonnage propre !
Aujourd'hui encore, la propreté dans Paris reste toujours un enjeu politique... A consulter sur notre site la page des questions / réponses du Conseil de Paris.
7 Mars 1884, Eugène Poubelle, Préfet de la Seine signe pour la deuxième fois en quelques semaines, et après intervention des élus parisiens, un arrêté ayant pour titre "Enlèvement des ordures ménagères, Règlement".
Ces arrêtés (le premier date du 24 novembre 1883) posent les bases de la collecte des ordures ménagères et définissent les caractéristiques du récipient qui sera mis à la disposition des locataires des immeubles et qui deviendra la fameuse "poubelle" !
Avant de fêter les 120 ans de l'arrêté du 7 mars 1884, arrêtons nous quelques instants sur la séance du Conseil municipal parisien du 22 février 1884. En effet, c'est au cours de cette séance que va être votée la délibération qui sera reprise, presque en totalité, par le Préfet Poubelle. Cette délibération fait suite à plusieurs semaines de "bataille" entre les élus et le Préfet de la Seine, véritable organe exécutif.
Nous vous présentons, ci-dessous, l'intégralité du texte publié dans le BMO du 4 mars 1884 présentant la délibération votée le 22 février par les élus.
Le Conseil,
Vu l'arrêté préfectoral en date du 24 novembre 1883, relatif à l'enlèvement des ordures ménagères ;
Vu les propositions déposées sur cette question par divers membres du Conseil ;
Vu le rapport de ses 3e et 6e Commissions ;
Délibère :
M. le Préfet de la Seine est invité à modifier comme suit l'arrêté préfectoral du 24 novembre 1883 ;
Art. 2, § 2.
Au lieu de :
Le dépôt de ces récipients devra être effectué avant le passage du tombereau d'enlèvement des ordures ménagères, enlèvement qui doit commencer, etc.
Mettre :
Le dépôt de ces récipients devra être effectué une heure au moins avant l'heure réglementaire de l'enlèvement qui doit commencer, etc.
Art. 3, § 1er
Au lieu de :
Chaque récipient aura une capacité de 80 litres au minimum et de 120 litres au maximum.
Mettre :
Chaque récipient aura une capacité de 120 litres au maximum.
À cet article, ajouter un § 3 ainsi conçu :
Ces récipients seront tenus à la disposition des locataires et par les soins des propriétaires, depuis 9 heures du soir jusqu'à l'heure où ils doivent être déposés sur la voie publique.
Art. 4. Sous réserve des exceptions prévues ci-après aux art. 5 et 6, il est interdit aux habitants de verser leurs résidus de ménage ailleurs que dans les récipients communs à l'immeuble. Ils ne devront effectuer ce versement que le matin, avant le passage du tombereau d'enlèvement. Si le récipient commun vient à faire défaut, ils devront, soit laisser leurs récipients particuliers à la place ou auprès du récipient commun, soit attendre le passage du tombereau pour y verser directement le contenu de ces récipients particuliers.
Supprimer la phrase en italique : ils ne devront effectuer ce versement que le matin, avant le passage du tombereau d'enlèvement. (Le reste est maintenu).
Art. 6. Il est également interdit de verser dans les récipients communs les objets suivants dont l'Administration assure l'enlèvement, mais qui doivent être déposés dans des récipients spéciaux à côté des récipients communs, savoir :
1° Les débris de vaisselle, verre, poterie, etc., provenant des ménages.
2° Les coquilles d'huîtres.
Supprimer le § 2
Art. 7. Il est interdit aux chiffonniers de vider les récipients sur la voie publique ou de faire tomber à l'extérieur une partie quelconque de leur contenu, pour y chercher ce qui peut convenir à leur industrie.
Mettre :
Il est interdit aux chiffonniers de répandre les ordures sur la voie publique ; ils pourront faire le triage sur une toile et devront remettre les ordures dans les récipients.
Le vote reflète les dissensions internes au Conseil :
Nombre de votants : 52
Majorité absolue : 27
Pour : 34
Contre : 18
Vous trouverez des compléments de ce texte dans le numéro spécial de l'Hermine intitulé : La poubelle a 120 ans ! Voir ci-contre.
Pour en savoir plus sur l'Hermine, cliquez ICI.
Bibliographie et Sources:
Jeanne-Hélène Jugie, Poubelle-Paris, la collecte des ordures ménagères à la fin du XIXème siècle (Sélection du Reader's Digest - Larousse, 1993).
Bulletin Municipal Officiel de la Ville de Paris (ces bulletins sont consultables à la Bibliothèque Administrative de l'Hôtel de Ville de Paris).
La poubelle laisse la place aux bacs
Dans les années 1990, date de construction de cet immeuble (Paris 11ème), la collecte sélective n'existait pas. L'adaptation du local poubelles en local propreté n'est pas évidente (local installé au sous-sol entre le parking et les caves...). La multiplication des bacs réduit d'autant l'espace. Mais l'ensemble reste accessible. L'information se réduit à une simple affiche.
Photos © Jean-François Ségard / Planète écho
Si, avec la mise en place de la collecte sélective, les gestes quotidiens ont changé, le vocabulaire attaché aux déchets a, lui aussi, évolué. On ne parle plus de poubelles mais de bacs ou de conteneurs (avec des couvercles de couleurs différentes). On ne parle plus de local poubelles mais de local propreté.
Les bacs deviennent "intelligents". Munis d'une puce, ils sont pesés à chaque collecte. Ce moyen permet l'établissement de statistiques fiables sur les quantités de déchets générées par chaque immeuble. Pourtant, la taxe d'enlèvement des ordures, payable par les propiétaires (et récupérable auprès des locataires), ne tient pas compte de la quantité de déchets produite.
De même, les déchets deviennent des "matières premières secondaires" avec lesquelles il est possible de (re)fabriquer de nouveaux objets tout en réalisant des économies d'énergie conséquentes et en protégeant l'environnement.
Dans une résidence de Montpellier, les bacs de la collecte sélective ont été installés dans le local vélo, malheureusement sous exploité.
Dans les vieux immeubles parisiens (fin XIX°), les bacs trouvent leur place dans la cour à côté des vélos.
Autres changements : les "unités d'incinération des ordures ménagères", ce que l'on nomme habituellement usine d'incinération, cherchent, elles aussi, à se valoriser en devenant des "Centres de valorisation énergétique des déchets". Vocable sans doute plus facile à implanter près des populations ! De même, les fameuses décharges devenues des "Centres d'enfouissement techniques", et qui continuent à exister malgré l'interdiction fixée par la loi de 1992, souhaitent devenir des "bioréacteurs" en rapport avec leur nouvelle fonction de récupération des gaz issus de la fermentation des déchets.
Le vide-ordures
Si, pendant longtemps le vide-ordures a été présenté comme un élément du confort moderne, il devient aujourd'hui un ennemi de l'hygiène et un frein au développement de la collecte sélective, même si certaines sociétés présentent des vide-ordures sélectifs (!!).
Ennemi de l'hygiène : le vide-ordures devient très vite un nid à microbes et à parasites. Son entretien nécessite des désinfections coûteuses et régulières. De plus, il présente un danger pour les gardiens d'immeubles : trop souvent les locataires y jettent leurs déchets en verre qui cassent avant d'arriver en bas. Il ne faut pas oublier les nuisances sonores, liées au bruit des déchets tombant dans les conduites métalliques, mais aussi les nuisances olfactives dues aux déchets jetés en vrac dans le vide-ordures.
Frein au développement du tri : le geste machinal de tout jeter dans le vide-ordures empêche toute reflexion sur le devenir potentiel du déchet. Tout passe à la trappe. Du coup, pas de tri à la source, et voici des tonnes d'emballages perdus. Pourtant il est si facile de trier ses emballages dès le retour du marché. Séparer les cartons, les papiers, les plastiques ne nécessite pas plus de temps que d'ouvrir la trappe du vide-ordures.
La fin des vide-ordures ? La loi du 2 juillet 2003 (Loi N°2003-590) facilite la suppression des vide-ordures dans les immeubles. La loi "Urbanisme et habitat" introduit de nouvelles règles afin de favoriser la suppression des vide-ordures. Il semble désormais plus facile de les faire supprimer (il s'agit maintenant d'un simple vote à la majorité des copropriétaires). La nouvelle loi précise cependant que la suppression des vide-ordures ne peut se faire que pour des "impératifs d'hygiène".
Restons tout de même vigilents, car au moment où la loi était votée, des "doux rêveurs" nous parlaient du retour des vide-ordures. Dans le N°134 (juillet 2003) de Direct Résidentiel un article sur la cuisine du futur dans l'habitat collectif nous faisait l'éloge du vide-ordures. Mettant en avant les inconvénients de la collecte sélective (plusieurs poubelles à descendre, problème de place dans les appartements pour stocker les différents types de déchets) il ne restait plus qu'à présenter la solution idéale : un vide-ordures qui ne sent pas (surfaces traitées par des techniques antimicrobiennes et intérieur maintenu en légère dépression par rapport à la cuisine) et bien entendu insonore (!)
Il est bien loin le temps où le français Jean Baptiste André Godin inventait, à la fin du XIX° siècle, la "trappe à balayures", ancêtre du vide-ordures que l'on retrouvera dans les immeubles de l'après première guerre mondiale. Mais le pire reste encore le broyeur électrique (inventé aux Etats-Unis en 1938) qui permettait l'évacuation des déchets de cuisine directement depuis l'évier. Les déchets solides étaient broyés et évacués avec les eaux usées... Il ne restait plus qu'à les traiter en station d'épuration plutôt que de les faire brûler dans les usines d'incinération des ordures ménagères.
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Compléments bibliographiques et historiques
Extraits de : Histoire de l'Hôtel de Ville de Paris, par Monsieur Le Roux de Lincy. Librairie de la société de l'école de Chartes, Paris 1846
(...) je m'attacherai seulement à donner, sur quelques-unes [l'auteur présente les prérogatives que se réservent les magistrats de la Ville], des détails nouveaux qui prouveront que, du XIII° au XVI° siècle, les prévôt des marchands et échevins s'appliquèrent constamment à conserver, agrandir et assainir la capitale dans toutes ses parties.
C'est dans le cours de l'année 1184 que Philippe Auguste fit paver les principales rues de la ville. Rigord* s'exprime ainsi à ce sujet : "Le roi se trouvant à Paris pour les affaires de l'Etat, habitait le palais dans la Cité. S'étant mis à une fenêtre d'où il voyait les eaux du fleuve, par laquelle il aimait à regarder, pour se distraire, les chariots qui traversaient la Cité soulevèrent une odeur si fétide de la boue amassée dans les rues, que le roi ne put la supporter ; il jugea qu'il était nécessaire d'exécuter un projet auquel avaient pensé quelques-uns de ses prédécesseurs, mais qu'ils n'avaient pas exécuté à cause de la trop grande dépense. Ayant donc convoqué les principaux bourgeois de la ville et le prévôt, il donna l'ordre de garnir de fortes pierres les rues principales".
* De Gestis Philippi Augusti ; Recueil des histor. de France. Rigord. Une version "moderne" et traduite du texte existe : Vie de Philippe II Auguste, Paleo, Le temps du Gothique, 2003.
Cette affirmation est vivement critiquée : "Aucune étymologie scientifique n'a été proposée avec certitude ; les rapprochements avec le latin lutum "boue" ou le grec lougeion nom d'un marais, s'ils sont séduisants à cause du caractère quelque peu marécageux du site, n'ont pas de fondement philologique et ne peuvent être retenus".
Nouvelle histoire de Paris. De Lutèce oppidum à Paris capitale de la France. Paul-Marie Duval. Diffusion Hachette. 1993.