08-03-2005, 18:58
Au Sud c’était la colline
La mer c’était notre piscine
Le ciel c’était la vitrine
Les hommes des pêcheurs d’sardines
Pierre Pons le très poli premier adjoint au maire de Marseille fredonne cette version régionale d’un célèbre refrain. Il a l’âme guillerette, le premier magistrat de la ville lui a confié la délégation de la couverture du Stade Vélodrome.
" Pierre bâche-les " lui a-t-il simplement ordonné d’un raccourci dont il a le secret. Cette confiance l’emplit de joie et d’allégresse et depuis l’annonce de cette nomination il passe le plus clair de son temps à fredonner des standards dont il s’amuse à régionaliser les paroles.
Amateur de foot depuis sa plus tendre enfance il s’est pris d’une soudaine passion pour l’art lyrique en supportant Éric le King, depuis il est devenu un inconditionnel du bel canto. Il fréquente indifféremment les balcons de l’Opéra et les travées du Vélodrome.
S’il est rarement déçu des prestations des chanteurs qui se produisent à l’Opéra, il n’en est pas de même des animateurs du Stade, les joueurs comme les spectateurs, les solistes du terrain comme les ch½urs des tribunes rares sont ceux trouvant grâce à ses yeux et….à ses oreilles.
Ces dernières, exercées regrettent le temps où tout le stade chantait à l’unisson, où d’une même voix " l’onde s’enflait dessous et d’un commun accord " le Sud et puis le Nord faisaient vibrer les corps.
Ce promeneur du chant de Mars déplore cette foule trépidante, cette cacophonie actuelle où l’identité des âmes et des hommes ne se retrouve plus dans ce désordre sonore, dans ce tohu-bohu dissonant.
Parfois, un vibrant " Aux Armes " réveille de lointains souvenirs : un " Land of my fathers " qui l’avait pétrifié, les larmes aux yeux dans la ferveur vibrante d’un Arms Park de Cardiff où la notion de rivalité s’effaçait devant ce chant céleste .
A Marseille aussi le chant c’est leste….et attise les passions.
Par un joli pied de nez du destin, le prochain visiteur du Stade Vélodrome a quelques similitudes avec le Pays de Galles. On y chante souvent dans cette partie de France où l’histoire est liée au développement puis au déclin de l’industrie minière, le chant est une affaire d’homme, un art mineur repris majoritairement les soirs de match à Bollaert. Là-bas ça pousse allègrement la chansonnette. Certes, comme partout ailleurs, la star en herbe reçoit les recommandations d’usage des aînés :
" Tu veux faire Carrière ? Passe ton Bak d’abord enchaîne avec Jussié chemin indispensable pour fréquenter l’Hilton et paré du Gillet comme un notable provençal alors tu seras Leroy mais pour l’instant il n’est pas ton Cousin ! " C’est la même chanson, (Song in english) l’éternel refrain.
Lens est une équipe qui, à domicile, ne manque pas de ch½ur. Cependant cette année quelques coups de canon des équipes visiteuses ont refroidi l’harmonie musicale des " choronistes ".Le supporter et la trompette étaient mal embouchés. C’était tremolo dans la voix à tous les matchs. Pierre se souvient qu’on retira sa baguette à Muller, le vieux chef de chorale pour la confier à un novice avec une grande réussite. Qui aurait pu imaginer que Gillot pèterait le feu ? Pas grand monde hormis quelques vieux météorologues avisés.
Les Lensois depuis cette modification capitale retrouvent un niveau que leur recrutement d’avant saison laissait présager. On découvre un Lens gros bras, un Lens arm strong comme le définissent les journalistes pluridisciplinaires de Sky Sport.
Au Vélodrome ce n’est pas trop la ballade cette année, le public en manque de Diva critique les solistes, le changement dans le Midi a été aux antipodes de celui du Nord, un novice a laissé sa place à un directeur expérimenté, un spécialiste de la World music, enrichi de partitions glanées çà et là. Les premières représentations, spectaculaires et réussies, ont fait renaître de beaux espoirs dans les esprits, le supporter reprend du poil de la bête, certains même rêvent d’un trophée, une tête de Lyon dans le salon et par voie de conséquence un titre dans le palmarès. La dernière visite chez un vieil ennemi héréditaire à refroidi les joueurs et les supporters marseillais. Pierre Pons comprend que c’est râpé. Il est surtout désolé pour le dernier arrivant que des lazzis tombant du poulailler ont méchamment saké alors qu’il était aussi à l’aise sur la neige qu’un paysan lozérien baguettes en main peut l’être devant un bol de riz. Enfin chacun ses Hognon s’amuse Pierre Pons.
Représentation primordiale ce samedi soir, les supporters lensois qui se déplaceront pousseront la goualante aux marseillais de pousser la gueulante.
Ténor ? T’es Sud ? Qu’importe ! Ce sera d’une seule voix, celle qui portera à l’unisson l’équipe vers la victoire.
" Contre Lens il ne s’agit pas de caler " dit Pierre au Conseil municipal, heureux de cette saillie digne d’André Santini son maître en la matière.
Encouragé par les rires il enchaîne " Tout bien pesé, si on bat Lens on saura ce que les hommes de Robert valent. "
Quel fléau ce Pierrot !
Cétacé